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Y a t’il un pilote dans l’avion ?

« Les Amants Passagers » de Pedro Almodovar

mardi 9 avril 2013, par Sébastien Bourdon

La veuve d’André Bazin, père fondateur de la cinéphilie française, disait que l’on reconnaissait le cinéphile lorsqu’entre un bon repas et un bon film, il choisissait le bon repas. J’ai tenté d’avoir les deux, du coup j’ai raté les trois premières minutes du film.

Le dernier opus de l’immense réalisateur espagnol est une distraction, une pause après des films tellement beaux jusqu’à en devenir parfois maniérés. Pedro Almodovar se rafraîchit en décidant de réaliser une pochade sur la situation calamiteuse de son pays, produisant un film grossièrement métaphorique, assez drôle, mais pas complètement réussi, loin de là.

Tournoyant dans le ciel au-dessus de Tolède dans un avion au train d’atterrissage bloqué, entre bavardages, drogues et sexes, on tente en Classe Affaires de faire abstraction de la périlleuse situation qui menace, en l’air, comme au sol. En seconde, on a drogué tout le monde et c’est donc endormi que le petit peuple subit ces mésaventures, restant ainsi totalement ignorant de ce qui se trame.

Dans ce huis-clos aérien, domine surtout un trio de stewards impérial, une addition de personnalités extravagantes de nature à réjouir même les homophobes les plus endurcis. Les « maricon » entraînent les passagers dans une furia de musiques et de mots, afin de leur faire oublier le risque d’une chute cruelle et douloureuse. Cet abatage humoristique tutoie les sommets (en même temps, c’est normal, on est en l’air) lors d’une chorégraphie endiablée sur l’air de « I’m so excited » des Pointer Sisters. J’en ai pleuré de rire.

S’agissant de la mise en scène, la symbolique est un peu lourde, mais l’ensemble est surtout un peu décousu, souffrant au surplus de fréquentes baisses de rythme. On peine à s’intéresser à tout ce qui se dit et on se lasse quelque peu quand même de la grivoiserie permanente, si drôle soit-elle.

Évidemment, comme toujours avec Almodovar, décors et personnages sont admirablement photographiés et filmés, avec une caméra fluide d’autant plus admirable que l’on quitte peu cet espace clos (et une musique formidable, je me suis même dit que je devrais écouter Metronomy, et ce après tout le monde, ce qui me convient bien finalement). Et puis, si Pedro Almodovar préfère les garçons, ce qui est particulièrement évident dans ce film, il n’en photographie pas moins admirablement les femmes, leur restituant leur invariable grâce, quelque soit leur âge ou leur physique.

L’on quitte la salle encore enchanté par le diabolique trio sus-évoqué mais en déplorant toutefois que le film n’ait pas été mieux tenu et le sujet plus approfondi. Ou a contrario, que la folie ne se soit pas encore plus emparée du film, jusqu’au délire.

Sébastien

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