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« L’inconnu de la Grande Arche » de Stéphane Demoustier

dimanche 9 novembre 2025, par Sébastien Bourdon

Grand Art

De tous les monuments construits à l’initiative de Mitterrand, Président bâtisseur, la Grande Arche n’est pas forcément celui qui aura laissé la plus évidente trace artistique.

Grand cube coincé au milieu d’immeubles de bureau, il a fini par être absorbé par le côté utilitaire de cet ensemble communément appelé La Défense.

Cet édifice aurait en réalité dû être tout autre chose, et ce rappel à la cruelle réalité pour les artistes et les rêveurs semble être un des messages du film.

Parfait inconnu, comme le rappelle le titre, l’architecte danois Johan Otto von Spreckelsen (Claes Bang) gagne en 1983 le concours organisé par la Présidence, à charge pour lui de bâtir un monument ne trahissant pas la perspective de l’axe historique de Paris.

L’élégance naturelle de l’homme et ses propos souvent lapidaires dissimulent mal une exigence esthétique et intellectuelle rigoriste, évidemment très inadaptée à un projet éminemment politique et technocratique.

En effet, son enthousiasme - modéré dans son expression, il est danois - est très vite douché par la réalité cruelle de la mise en œuvre de ses visions d’artiste.

Et alors qu’il avait au départ toutes les raisons de croire à une ouverture généreuse à ses ambitions esthétiques - ne serait-ce que parce qu’il a le soutien d’un homme qui semble comprendre l’art, François Mitterrand (Michel Fau) - son projet se détricote, le plongeant dans des abîmes de désespoir.

Stéphane Demoustier parvient, avec énormément de pertinence et de maîtrise, à exposer aussi bien l’immensité des chantiers, les rêves de l’architecte, que la basse cuisine de l’exercice du pouvoir.

Filmer des immeubles, qu’ils soient achevés ou en construction, n’est pourtant pas exercice aisé et il nous fait toucher du doigt l’exercice même de l’architecture, du cerveau qui imagine au premier coup de pelleteuse.

Si rude et triste puisse sembler le parcours de son protagoniste, le réalisateur conserve tout du long la possibilité élégante d’en sourire comme de s’en émouvoir.

Le film est en réalité habité par la personnalité complexe et torturée de son protagoniste : grand et athlétique, la mise impeccable, il persiste néanmoins, en bon nordique, à porter des sandales de cuir qu’il vente ou qu’il neige, faisant de lui une sorte de colosse aux pieds d’argile.

Sébastien Bourdon

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