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For those about to rock

Rodrigo y Gabriela - Olympia le 10 avril 2010

dimanche 11 avril 2010, par Sébastien Bourdon

Pas de doute, pas de débats, c’était un concert de Metal. Oui, je sais, cela peut surprendre s’agissant d’un couple de mexicains armés de guitares sèches et pourtant si (Señor). Je vais m’expliquer.

J’étais sceptique sur le projet, étant d’une nature peu sensible à la guitare flamenco. Et puis, je me méfie toujours de la reprise, de la « cover », sensée rendre accessible ce qui ne l’est pas forcément à tous (genre les horribles « Nouvelle Vague »). Mais bon, après avoir pleuré sur la sublime reprise du « Orion » de Metallica (in Master of Puppets) par Rodrigo y Gabriela, et grâce à la générosité d’une belle et bonne amie, le couple Bourdon s’est finalement rendu de conserve au concert avec un certain enthousiasme. Et, il faut bien le dire, ce fut impressionnant.

Le concert a débuté par une superbe prestation du Alex Skolnick Trio. Qui est ce monsieur ? Rien de moins que le guitariste des légendes métalliques de Testament. La dernière fois que je l’ai croisé, c’était en 1ère partie de Black Sabbath (avec Dio), le 15 septembre 1992. Ce soir, c’est différent, puisque c’est en trio jazz qu’il se produit. Musique élégante et énergique, servie par des musiciens impeccables. Tout en sourire et en français, Monsieur Skolnick va embarquer la salle avec une déconcertante facilité alors que sa musique n’est pas dépourvue d’exigence. Pour les amateurs (et il y en a, j’en connais), le set s’est conclu par une reprise étonnante de « Electric Eye » de Judas Priest.

Vingt minutes d’attente, debout dans la fosse de l’Olympia, pleine comme un œuf. Tout à coup, sur les accords d’un morceau de Tool (« The Pot »), le son s’intensifie, la lumière finit par s’éteindre et entrent sur scène notre sémillant duo de mexicains. Alors là, je me suis dit que ces musiciens avaient un certain sens du courage. Je veux dire si on coupe Tool, le silence se fait sacrément présent et tenter de le remplir juste derrière avec de la guitare acoustique, la tâche n’est pas aisée. Même pas peur, même pas mal, ils empoignent leurs instruments et c’est parti pour deux heures de généreuse cavalcade.

Lorsqu’ils ont commencé à jouer, j’ai immédiatement senti mon corps au diapason de mes oreilles. Je me suis retourné pour regarder autour de moi et ai vu que mes sensations étaient largement partagées. Tout le monde souriait, une immense vague de bonheur venait de coucher toute la salle dans la béatitude totale. Impressionnant, et on en était qu’au début.

Là-dessus aussi, j’étais un peu dubitatif, comment ces charmants jeunes gens allaient nous maintenir intéressés avec de la musique uniquement instrumentale, dans une grande salle, le temps d’un - long - concert ? Il semble que ce ne soit clairement pas un problème. Avec un mélange de puissance et d’inventivité, ils nous ont maintenus debout tout du long, la tête bien haute dans la musique.

Il y eut un peu d’aide occasionnelle certes, les battements de mains du public, une intervention du Trio Joubran (musiciens palestiniens traditionnels), une participation du Alex Skolnick Trio, mais bon, tout ça tenait quand même sur leurs épaules et dans leurs mains.

Touchant et amusant, l’ingénuité reste encore très présente dans l’attitude - comme émerveillés de leur succès - et c’est avec le courage des timides qu’ils prennent d’assaut les scènes mondiales. Quel plaisir d’ailleurs de voir une femme sur scène, c’est tout de même trop rare. Il est vrai que cette partie non négligeable, voire majoritaire de l’humanité, m’intéresse beaucoup et qu’il est peu fréquent d’en voir gratter une guitare. La frêle et menue Gabriela s’est acquittée de cette tâche avec une force sidérante, parcourant en tous sens les cordes de son instrument, le tambourinant, tout en headbangant comme si sa vie en dépendait. Petit chose menue et timide qui ne manqua pas de dresser souvent vers le ciel son poing avec l’index et l’auriculaire fièrement levés (essayez chez vous, vous verrez de quel signe je parle).

Ce qui m’amène au Heavy Metal (rooooo, mais comment fait-il pour toujours y revenir ?). Rodrigo y Gabriela, par leur histoire et à longueur d’interviews, revendiquent ce genre comme étant celui qui les a formé, leur inspiration première. On n’en doute pas une seconde. Ils sont de ce bataillon.

Le Metal est un culte et comme toute religion polythéiste, il a ses idoles, ses « Metal Gods ». Il en est qui sont tombés sur le champ de bataille et c’est leur ombre qui a souvent plané sur le concert. Cliff Burton, premier bassiste de Metallica, mort à 24 ans dans un accident de tour-bus, s’est vu offrir le plus bel hommage avec leur reprise du morceau « Orion ». Sachant qu’ils allaient le jouer, j’avais pris des mouchoirs, et ils m’ont servi. Dimebag Darrel, guitariste virtuose de Pantera, assassiné sur scène par un psychopathe, s’est vu offrir le sublime « Atman », composition figurant sur le dernier opus de Rodrigo y Gabriela. Alex Skolnick, présent sur le disque, est monté sur scène pour le jouer avec eux, se fendant d’un solo qui a envoyé tout le monde dans la stratosphère et qui m’a fait ressortir mes mouchoirs. Schéma classique, public en délire, Sébastien tout ému (état qui s’est arrangé quand Rodrigo a joué les riffs de « Master of Puppets » et « Battery » de Metallica, je me suis mis à hurler, prêt à partir à l’assaut, la bave aux lèvres, fuckin’ heavy).

Après des rappels comme s’il en pleuvait, il a bien fallu qu’ils partent. Ils ont posé leurs guitares et ont salué la foule dans un extatisme partagé, pendant que la sono crachait à fond du AC/DC. La classe totale, mais aussi l’évidence : c’était un concert de Metal, avec tout ce que cela entend comme générosité, spontanéité, vélocité et intensité. Rodrigo y Gabriela au Hellfest !!!!

Sébastien

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