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Le grand retour de Slayer !

jeudi 13 novembre 2008, par Sébastien Bourdon

Ce soir, 11 novembre 2008, on ne rigole plus, on tape dans le sérieux, le lourd : SLAYER en tête d’affiche d’une tournée Unholy Alliance - Chapter III. Les papes du thrash metal (date d’ouverture des hostilités les concernant : 1981) seront ce soir précédés de trois groupes, dans l’ordre, Amon Amarth, Mastodon et Trivium.

En attendant mon petit frère devant le Zénith, j’écoutais d’une oreille distraite les conversations alentour. A côté de moi, une bande de jeunes chevelus piercés et tatoués évoquait les mérites du cinéma de Wong Kar-Wai. Définitivement, le métalleux est une espèce surprenante.

C’est un petit Zénith qui s’ouvre à nous : la salle est réduite et loin d’être remplie, je pense que Slayer a tort de se faire accompagner, tout seul avec des billets un peu moins chers, je suis sûr que la salle eût été comble.

J’ai raté le début du 1er groupe, Amon Amarth. J’ai beau en savoir des choses sur ce genre, j’ai du chercher sur le net pour savoir comment qualifier précisément leur musique : c’est un « viking metal band », on va donc dire du death metal suédois. Ce que ça donne en live : rigolo (si, si), propre et carré. Mais ça me parle peu, je trouve ce genre beaucoup trop écrasé par l’utilisation systématique de la double grosse-caisse qui en fait aplatit tout. Sinon, le chanteur - sorte de Chabal avec du bide - était marrant avec son look de viking et sa bière servie dans une corne de bouc (« Skoll !!! » nous a t-il déclaré).

La bière des uns donnant soif aux autres, on regroupe les amis présents pour aller s’en boire une petite avant d’écouter le groupe suivant : les formidables Mastodon. Je le dis haut et fort, ce groupe est brillant et créatif, ce qui de nos jours peut se faire rare. Il me tardait de les voir en vrai, je ne fus pas déçu. Même amputé d’un guitariste (absent pour cause de maladie), le groupe nous a brillamment envoyé dans les gencives sa musique sauvage et intelligente. Une mention à leur extraordinaire batteur qui en réalité est une sorte de jazzman égaré dans le genre, jouant tout en roulements creusés au fin fond de son instrument avec une vitalité proprement sidérante. Ce garçon raconte partout qu’un de ses albums favoris de tous les temps est le Lamb Lies Down on Broadway de Genesis (il considère Phil Collins - du temps où il était barbu et ne chantait pas, je présume - comme l’une de ses influences majeures) : on est en phase.

La suite nous fait plonger dans l’abomination : Trivium. Le heavy metal de la honte : du Christina Aguilera avec un peu de chant guttural et de la double grosse caisse sans une once de groove, mais juste pour faire crédible. Musiciens ridicules et putassiers (mon Dieu, ces looks et ces guitares). Leur crétin de chanteur nous a même déclaré qu’on était le public le plus cool de la tournée. J’en ai hurlé un truc du genre « et moi je t’encule », ce qui n’est pas très élégant, je n’en disconviens pas, mais ça soulage, demandez donc à notre Président de la République. Bref, c’était mauvais et même archi-mauvais et je me suis béni de n’avoir pas emmené un béotien de cette liste qui aurait retenu à cette occasion le pire du genre que j’affectionne pourtant tellement.

Ces trois quart d’heure perdus, nous pouvions enfin nous préparer au plat de résistance. Slayer, je les avais déjà vus une fois, et dès le début du concert, j’ai le souvenir d’avoir cherché le bas de ma mâchoire dans les tribunes : la puissance de feu est telle qu’on est simplement scotché à son fauteuil, totalement immobilisé. Ce groupe peut faire bouger mes cheveux sur ma tête quand je viens juste de les tondre, pour vous donner une idée.

Et là ça n’a pas manqué, dès le premier morceau (« Flesh Storm » sauf erreur), la même divine claque. Et c’est à l’avenant, ce groupe avec une économie de mouvements remarquable, quelques ondulations de cheveux (pour ceux ça concerne encore dans le groupe) et des déplacements paisibles le long de la scène, déclenche un barrage sonore nourri qui laisse littéralement pantois.

Groupe provocateur aux personnalités ambigües, sulfureux dans ces thèmes (au début, plutôt satanisme et serial-killer, maintenant guerres, athéisme, ... ce genre de sujets, pas vraiment la bonne humeur en fait). Slayer est quand même un groupe américain qui a sorti un album intitulé God Hates Us All pile le 11 septembre 2001. Je me souviens de leur concert à Bercy durant la tournée ayant suivie ledit album, durant lequel Tom Arraya (basse, chant) déclarait : « You think it’s gonna get better ? You’re wrong, it’s gonna get worse. »

Alors que j’étais comme abasourdi par la puissance de leur musique, ils ont joué un titre extrait de leur excellent dernier album (Christ Illusion), « Jihad ». Sur cette musique d’une rare intensité, l’écran projetait notamment des images de Ben Laden. Et je me suis mis à phosphorer sur la différence fondamentale entre une abomination comme Trivium et Slayer. Les premiers sont un pur produit de la société de consommation de masse, abétifiée et acculturée, et ils se plongent dans ce triste moule, sans plus y penser, en espérant un jour passer à la télé. Au contraire, Slayer traque cette foutue société, nous immerge dans son évidente brutalité et nous pousse à une réflexion sans concession. Rien que ça ? Oui, je le pense.

Et puis nom de Zeus qu’est-ce que c’est bon : « Seasons In The Abyss », « Angel Of Death », « Chemical Warfare », « South Of Heaven », « Raining Blood », « War Ensemble » (un 11 novembre, ça s’imposait), toutes ces petites perles sauvages conduites de main de maître par l’impérial Lombardo (batterie) !!

Dans un documentaire sur Slayer, on interrogeait un handicapé physique sur sa passion pour ce groupe. Il répondait peu ou prou : « tout le monde me dit qu’ils ne parlent que de la mort. Pas du tout, je n’y entends que de la vie ».

Il y eut quand même quelques bémols, j’ai trouvé le public un peu mou et encore une fois, clairsemé. On entendait mal Kerry King (guitare) ce qui est dommage et surtout le set fut trop court (pas de « Dead Skin Mask » !!!). Je trouve qu’ils se sont trop focalisés sur le début de leur carrière et la toute fin, omettant quelques splendeurs. Trop de Trivium raccourcit le Slayer, quelle honte.

Propos de sortie de concert. Bertrand : « Ils ont joué tout Reign in Blood, je veux dire c’est comme si Vivaldi revenait jouer les Quatre Saisons ! ».

Dans la nuit humide de novembre, réchauffé par un joli tee-shirt tout neuf de Mastodon, j’ai rejoint mes pénates, l’album Diabolus In Musica dans le Kangoo.

Sébastien

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