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Le fond de l’air est frais

« Au Bout du Conte » d’Agnès Jaoui

mercredi 20 mars 2013, par Sébastien Bourdon

Selon Gérard Depardieu, notre trublion en exil, « la France est triste ». Il venait peut-être de voir le film qui va être évoqué ici.

Le tandem Bacri-Jaoui revient toujours au même point : les vicissitudes sentimentales des blancs moyens, enjeux minimes mais universels dans un monde de plus en plus formaté. Cette fois, l’originalité réside dans l’idée de visiter ces névroses et appétits sous l’angle du conte (concept souvent visité par la psychanalyse n’est-ce pas). L’idée n’est d’ailleurs pas mauvaise et le film a ses moments.

Très vite, nous comprenons que le monde se divise ici en deux catégories : certains personnages - ceux qui ont dépassé les 40 ans depuis un moment - ont littéralement les mains dans le cambouis (Jaoui - Bacri), les autres, plus jeunes et encore beaux, se bercent de jolies illusions. Le distinguo ne se fait toutefois pas que sur l’apparence physique, Agathe Bonitzer est évidemment plus fraîche, mais s’incarne aussi dans le jeu des acteurs, plus éthéré, presque romehrien. Cette jeune rousse diaphane (raaaa lovely) incarne ainsi diablement bien la candide princesse en quête d’un prince charmant.

Là où le bât blesse, c’est qu’il manque à l’ouvrage un réalisateur qui saurait donner à l’ensemble le charme, la drôlerie et le caractère fantasmagorique propres aux contes de fées. Les images sont plutôt laides, et les tentatives de flirt avec le fantasme ou l’effroi tournent court.

Cette modestie formelle peut toutefois s’expliquer par la morale du film, relativement sinistre, qui nous appelle à ne point nous bercer d’illusions, le risque de la chute étant presque certain. Heureux sont ceux qui ont l’ambition raisonnée, ils auront moins mal à l’âme.

Pourquoi pas, mais de ce fait, à l’instar de sa philosophie, l’œuvre manque nécessairement d’ampleur. Cela est certes quand même mieux qu’un bouquin de Foenkinos ou Lévy (quoique je n’en ai jamais lu), mais le souffle de l’épique, même à l’état de brise, j’aime assez. A défaut, un peu plus de poésie ou d’étrangeté auraient pu solidifier l’ensemble.

Le film est toutefois sauvé par sa belle écriture et la présence de l’inénarrable Jean-Pierre Bacri dont chaque apparition réjouit. En effet, personne aussi bien que lui ne restitue de manière aussi drôle les effets implacables du temps qui passe et de la monotonie des jours sur le corps et l’âme.

Sébastien

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