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« L’accident de Piano » de Quentin Dupieux

vendredi 11 juillet 2025, par Sébastien Bourdon

Le Vol du Corbeau

On dit souvent de ce réalisateur prolixe qu’il serait sur le tournage littéralement omniprésent, contrôlant jusque dans les moindres détails ce qui s’y passe.

Ce qui est certain c’est que Quentin Dupieux sait ce qu’il veut dire et par quels moyens y parvenir. Si foutraques puissent sembler ses œuvres, elles portent toujours un message, pas forcément limpide, mais de plus en plus sinistre, en humaniste progressivement désabusé qu’il est.

Magalie, alias Magaloche (Adèle Exarchopoulos), est une créature des temps modernes : elle a fait immense fortune en diffusant des vidéos d’elle-même s’auto-infligeant toutes sortes de sévices corporels, l’exercice lui étant facilité par son insensibilité à la douleur, pour la plus grande joie de ses followers.

Née au même temps qu’internet, elle en est la créature, et n’étant finalement pas non plus douée de sentiments, cette exposition violente et absurde d’elle-même lui est comme indifférente.

Elle est assistée au quotidien d’un homme à tout faire qu’elle traite sans égards (Jérôme Commandeur).

Secrète, elle se voit un jour contrainte et forcée de répondre à la première interview de son existence. La journaliste Simone Herzog (Sandrine Kiberlain) tente à cette occasion de comprendre le pourquoi de son comportement, au risque de découvrir qu’il n’y a peut-être aucune explication.

C’est dans cet échange qui n’aboutit jamais à rien, sommet de théâtre absurde, que vont se révéler les uns et les autres.

Quentin Dupieux pose sa caméra désabusée en altitude et que la montagne est belle (la conclusion du film est même proprement époustouflante). Mais le réalisateur se fait ici plus direct dans la noire exposition d’un monde déshumanisé et étrange.

Peu de réalisateurs se révèlent capables de dérouler, film après film, une constance esthétique, qu’elle soit photographique, musicale et intellectuelle. Ici encore, on est frappé par la beauté des plans, sans que cela nuise au rire grinçant et à l’étonnement continu - pouvant aller jusqu’à l’effroi - devant l’écran.

Le film a été co-produit par Arte et Netflix, c’est finalement peut-être cette exacte impossible synthèse qu’effectue brillamment Dupieux. Vivement le suivant.

Sébastien Bourdon

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