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« le Dernier des Juifs » de Noé Debré

vendredi 16 février 2024, par Sébastien Bourdon

Le Juif Errant

Bellisha (Michael Zindel) a la vingtaine bien entamée et habite seul avec Maman (Agnès Jaoui) dans un petit appartement du 93.

La famille est installée là depuis 1972, et c’est un petit monde sur le point d’être englouti qui entoure nos protagonistes. La synagogue a fermé, faute de fidèles, et l’épicerie kasher est sur le point de faire de même, faute de clients.

Bellisha persiste à arpenter le quartier, de sa dégaine dégingandée, garçon lunaire à l’apparence rêveuse, mais finalement solide dans sa détermination à ne pas se laisser dévorer par le monde. Il refuse le travail, l’engagement (il couche joyeusement avec une femme mariée à l’étage en dessous), et ment continuellement à sa vieille mère pour la maintenir dans une forme d’enchantement. A le regarder, on pressent qu’il ne semble s’imaginer ni ailleurs, ni différent.

Évidemment, le monde n’est pas forcément fait pour les poètes, quand bien même ils l’habiteraient comme tout un chacun, et en de multiples saynètes va se dessiner son parcours vers autre chose.

Le sujet est aussi grave que Bellisha s’efforce d’être léger : l’inexorable montée d’un antisémitisme dans les quartiers populaires, menaçant de renvoyer ailleurs les descendants de ceux qui, déjà exilés, pensaient avoir ici trouvé leur place.

La violence des situations n’est jamais esquivée, mais le réalisateur Noé Debré se refuse au frontal : à l’instar de Bellisha qui se préoccupe surtout de la manière de masquer leur réalité à sa mère, de manière aussi drôle que burlesque.

Las, même si l’on préfère trouver dans tout moment dramatique le comique de la situation, le réel est bien là, et finira par obliger Bellisha à prendre des mesures radicales, sans jamais se départir de son mystère comme de sa grâce.

Voilà un film léger et grave, une histoire de gens qui tombent et qui sans cesse se relèvent, ce qui n’est pas sans rappeler Charlie Chaplin. On nous montre avec une infinie délicatesse que nombre de nos problèmes contemporains sont aussi cruels que dépourvus de sens, tant il faudrait si peu pour arriver à accomplir tant de choses.

Sébastien Bourdon

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