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"We play rock n’ roll !"

Motörhead a Paris

jeudi 27 novembre 2008, par Sébastien Bourdon

Ce sont des oreilles en sang pour notre chroniqueur préféré qui, malgré tout, se réveille heureux ce matin...

Un soir de la semaine passée, alors que je me livrais tardivement à une de ces activités passionnantes de père de famille (vider/remplir le lave-linge/vaisselle, doser les antibiotiques pour les enfants...), j’écoutais d’une oreille distraite France Inter. Un commentateur en interroge un autre : « alors toi, mercredi prochain, Motörhead ou Leonard Cohen ? ». Ledit autre lui répond « Leonard Cohen évidemment !!! ». S’ensuit un échange de rires complices.

Ami lecteur, j’ai coupé la radio et de toute façon pour le mercredi 26 novembre, ma religion était faite.

Ce qui nous amène donc à ce soir glacé devant le Zénith, pour aller écouter deux trios : en ouverture, Danko Jones (jeune canadien brillant) et en plat de résistance, Motörhead.

Pour les néophytes, il y en a, Motörhead, c’est un socle, une base, un fondamental du genre. C’est bien simple, quasiment tous les groupes de heavy metal et de punk rock revendiquent leur influence. Groupe à géométrie variable (même si leur formidable guitariste y officie maintenant depuis près de 25 ans), c’est surtout et d’abord Lemmy (chant, basse), légende vivante du rock à côté duquel son compatriote Keith Richards ressemble à un aimable animateur de thés dansants. Le bonhomme est né en 1945, a échappé aux derniers feus du Blitz, a joué de tous les rocks possibles (peut-être même du doo-wop ou du skiffle comme Jimmy Page), porté les amplis de Jimi Hendrix, plongé dans le rock psychédélique avec Hawkwind et finalement, rien que ça, a finalement écrit les Tables de la Loi avec Motörhead :

“The only way to feel the noise is when it’s good and loud”

Le morceau dont est extrait cette vérité première s’appelle “Overkill”, il est extrait de l’album du même nom et date joyeusement de 1979. C’est idiot, mais là je vais vous raconter la fin, c’est le morceau qui a clôturé le concert. Précédé de l’inénarrable « Ace of Spades ».

Puisque ce n’est qu’un combat, continuons le début. Bloqué du dos toute la journée, coincé chez moi à travailler comme un con (fuck les NTIC, il est loin le temps où le mot liberté signifiait quelque chose) et à me demander si j’y vais/j’y vais pas. Et puis, fort d’une ingurgitation massive de Doliprane/Apranax/Thiocolchicoside (dans les prés), je grimpe dans mon véhicule, direction le Zénith.

20 heures tapantes, nous entrons dans la salle, très vite rejoints par le trio Danko Jones. Au début, j’ai cru que c’est mon portable qui vibrait tout le temps dans la poche de ma veste, en fait, pas du tout, c’était juste les coups de grosse caisse. Mâtin, quel son pour une première partie ! Et quelle fête que cette première partie ! Son dernier album avait fait la joie de la famille sur les autoroutes du Sud de la France cet été, la prestation scénique a confirmé tout le bien qu’on pouvait en penser. Danko Jones a le sens du spectacle, ce garçon est un des futurs grands, à n’en pas douter. Set efficace et puissant, avec le rappel de quelques règles essentielles, « in heaven people are sexy : Cliff Burton, Eric Carr, Isaac Hayes, Phil Lynott, James Brown... » et « it’s never too loud ». Leur prestation se termine sur l’intro de « xyz » de Rush, définitivement ces garçons ont du goût.

Ce soir, la salle est pratiquement pleine, comme quoi, j’avais raison, une bonne 1ère partie et un combo historique et les français n’hésitent plus à dépenser leur argent. Amusant également de voir que le public est assez bigarré, Motörhead attire bien sûr des cohortes de hardos old school et leur famille (plus de 30 ans au service du rock n’ roll, on arrive à trois générations) mais également quelques petits branchés, avec de jolies écharpes en cachemire qui ont dépassé l’entrée de la Cité de la Musique pour aller ainsi goûter aux joies du bruit.

Et puis Lemmy et les siens investissent la scène. Lemmy a dit un jour « si c’est trop fort, c’est que vous êtres trop vieux ». Même avec les boules quiès, c’était fort. On est peut-être vieux, d’ailleurs. A la sollicitation du guitariste Phil Campbell « Is it loud enough ? », on s’est regardés en se disant « euh en fait ça va là. » Il faut dire que ça envoie sérieusement, du bois d’Amazonie par forêts entières pourrait dire Phil’ Manœuvre. Mais ne nous trompons pas, on parle de rock n’ roll, c’est du Elvis qui aurait couché avec les Sex Pistols et Metallica.

Ce sont également des anglais (sauf le batteur, Mikkey Dee, qui est suédois), et Lemmy, qui joue au bourrin, est en fait une personnalité subtile et drôle (les textes de Motörhead alternent la franche rigolade avec la réflexion politique). Lorsque son guitariste s’adressait au public, ce tatoué chevelu de plus de 60 piges s’est ainsi agacé de ce que le public continue à parler en même temps. J’ai vu le moment où il allait nous réclamer une « cup of tea ».

Je ne vais pas vous faire une litanie des titres piochés dans une discographie de 20 albums ( !) : mais j’ai quand même adoré « Stay Clean » et « Killed by Death » - faudra écrire ça sur ma pierre tombale -, ou encore « In the Name of Tragedy » - dédicacée à Shakespeare et surtout « Metropolis », mon morceau favori de Motörhead, écrit évidemment en hommage au film de Fritz Lang.

Je n’ai pas vu passer le set, j’étais un peu amorti, mais voilà, je les ai enfin vus (car oui, je ne les avais jamais vus). Plus extraordinaire et surprenant, le rappel s’est ouvert par une improbable prestation unplugged du groupe (« Whorehouse Blues » extrait de l’album « Inferno ») et c’était comme si Lemmy (qui a joué de l’harmonica pour l’occasion) nous montrait comment tout cela finirait. Il y aurait un feu de cheminée, des guitares acoustiques et on chanterait des blues sur les bars à putes. Ca m’a bien plu, la vieillesse n’est pas forcément un naufrage, n’est-ce pas Johnny Cash.

Je suis passé par le merchandising pour m’acheter l’avant-dernier album de Danko Jones et un bonnet estampillé Motörhead (sans déconner, vous avez vu le froid qu’il fait ?!). A la sortie, je me suis également acheté un tee-shirt pirate, n’oublions pas que Motörhead a quand même le logo le plus cool du monde.

J’ai supporté les embouteillages du retour (travaux sur le périph’) grâce à l’écoute assidue de « No sleep til’ Hammersmith » (1981). Après je n’ai pas beaucoup dormi mais bon, « We are Motörhead and we play rock n’ roll ».

Sébastien

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