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« Une Belle Fille comme Moi » de François Truffaut (1972)

lundi 24 avril 2023, par Sébastien Bourdon

Girls just wanna have Fun

Stanislas Prévine (André Dussollier), chercheur en sociologie, désire écrire un livre (chez Truffaut, quoi de plus normal) sur les femmes criminelles. Il se rend en prison afin de recueillir la parole de quelques spécimens. Son choix se porte sur Camille Bliss (Bernadette Lafont). Flashbacks, récit dans le récit, elle va raconter à son micro quelles vicissitudes l’ont amenée là. Gouailleuse, on comprend vite que sa parole est trompeuse, du moins sujette à caution, et que la caméra démêlera le vrai du faux.

Film longtemps difficile à voir pour des questions de droits et devenu de fait l’œuvre la plus méconnue de Truffaut, il ne faut point passer à côté de ce bijou drôle et insolent, enfin disponible.

Ce film fait suite dans la carrière du cinéaste à l’échec cuisant du très littéraire et glacé « Les Deux Anglaises et le Continent » (1971) et se présente presque comme son contraire à tous égards. Pure comédie enlevée, Truffaut fait une exacte synthèse du travail d’Howard Hawks et de la Nouvelle Vague : vivacité continue, burlesque, absence de morale et sexualité débridée sont au programme, et ce n’est pas si fréquent chez le pudique Truffaut.

La femme est ici toute puissante (incarnée par une volcanique Bernadette Lafont) et se joue - si ce n’est se fout - des sentiments, faisant un usage immodéré et épicurien de ses charmes pour parvenir à ses fins : sortir de sa condition.

Si, comme souvent chez le cinéaste, la cruauté amoureuse est prégnante, il s’agit ici surtout de joyeusement rigoler des délices parfaitement inconséquents de la chair. Tant pis pour les mâles, même les romantiques paieront comme tous les autres, pas moins idiots qu’ils le sont avec leur noblesse de sentiments surannée (et qui se gourent totalement de femme vers qui les tourner).

Les prolos (Philippe Léotard) comme les artistes (Guy Marchand) ne pensent en effet qu’à boire et baiser. Les avocats (Claude Brasseur) sont véreux (forcément), et pensent aussi beaucoup à boire et baiser.

C’est ce monde peu reluisant, mais diablement marrant, que Camille Bliss (nom de famille prédestiné) va conquérir avec sa fausse candeur et ses formes offensives et combattantes.

Dynamitage des mœurs étriqués de la province française avec l’énergie d’une screwball comedy : Truffaut savait tout faire ou presque, qu’on se le dise.

Sébastien Bourdon

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