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« Un Héros » d’Asghar Farhadi

dimanche 26 décembre 2021, par Sébastien Bourdon

La Vérité Nue

En Iran, un homme emprisonné pour dettes (Amir Jadidi) bénéficie de deux jours de sortie. C’est un gars sans grande envergure, mais avec de l’espoir et du cœur. Alors que cette trouvaille inopinée pourrait le tirer d’affaire, après quelques tergiversations, il renonce finalement à vendre un sac de pièces d’or trouvé par sa nouvelle compagne, le restitue à sa propriétaire et est alors érigé en héros national.

Cette dernière péripétie s’explique beaucoup par la volonté d’autorités étatiques en bout de course de profiter de lui pour se racheter une crédibilité auprès des électeurs : la prison qui formerait d’honnêtes citoyens avec le soutien d’organisations caritatives, une occasion de communiquer à son avantage qui ne se refuse pas.

Pensant sagement rejoindre le pénitencier, notre « héros » se voit ainsi embringué dans un jeu politique et humain complexe, où la manipulation n’est jamais loin, chacun tentant de tirer sa propre épingle du jeu.

De surcroît, ce garçon ne manque jamais une occasion de prendre la mauvaise décision. Avec un sourire de plus en plus réduit à sa stricte expression, il encaisse les coups, incrédule face à ce sort qui s’acharne quand tout semblait s’arranger enfin, avec l’amour et l’argent.

Comme souvent chez Farhadi, la mécanique est millimétrée : chaque mouvement, même minuscule, accélère la chute, tout s’imbrique minutieusement pour concourir au désastre.

Le plus passionnant du film réside toutefois dans la tentative de s’approcher de la définition même de vérité, celle sur laquelle devrait reposer la justice des hommes.

Notre « héros » n’est pas malhonnête, loin s’en faut, simplement pour établir son innocence et le bien-fondé de ses actions, il finit par mentir éhontément. Et comme une gangrène, tout le monde s’y met à l’unisson, et à ce naïf jeu de dupes, le désastre est inévitable, chacun se prenant les pieds dans le tapis qu’il a soigneusement tissé (hasard, coïncidence, le film se déroule dans la capitale iranienne… du tapis).

Contribuer à la démonstration de la vérité mais en s’enfonçant dans le mensonge, tel est le sublime paradoxe qui sous-tend tout le scénario.

Dans ce film tendu, tout se résume à cet échange : « je n’ai pas menti ! » « Oui, mais tu n’as pas dit la vérité ».

Sébastien Bourdon

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