Accueil > Francais > Cinéma > « Simple comme Sylvain » de Monia Chokri

« Simple comme Sylvain » de Monia Chokri

dimanche 12 novembre 2023, par Sébastien Bourdon

Sophia a deux Amours

Sophia (Magalie Lépine-Blondeau), tout juste quadragénaire enseignant la philo dans une université montréalaise pour le troisième âge, s’ennuie agréablement dans son ménage. L’amour avec Xavier (Francis-William Rhéaume) est devenu, après dix années, une belle amitié complice et ce d’autant que la maternité a été soigneusement évitée.

Et alors que l’affolement érotique n’est plus franchement d’actualité, Sophia tombe raide dingue de Sylvain (Pierre-Yves Cardinal), un coureur des bois, solide et viril gaillard missionné pour refaire leur chalet fraîchement acquis dans les Laurentides.

Tout les oppose si ce n’est leurs corps - ce qui fait déjà un bon bout du chemin (les scènes de sexe, bien que pudiques, sont particulièrement réussies, drôles et troublantes).

Lorsque le cœur s’en mêle, rappelant qu’il a des raisons que la raison ignore, l’inévitable se produit et Sophia décide de mettre fin à son union bien trop raisonnable.

Cette décision va évidemment provoquer moult situations drolatiques tant les différences culturelles sont abyssales, chaque classe sociale habilement restituée en prenant pour son grade (quand bien même on se permettra de penser que les bourgeois lettrés s’en sortent un peu mieux).

La réalisatrice québécoise s’attaque sans rechigner à un sujet rebattu : l’amour est-il possible quand on ne vient pas du même milieu socioculturel ? On ne compte plus les œuvres sur ce thème, grand classique de la comédie pratiquement depuis l’invention du cinéma.

Une fois qu’on a posé décor et concept, qu’est-ce que ce film a à dire ou à apporter à ce que l’on peut pratiquement qualifier de genre intrinsèque ?

Le plus incontestable est que le film est extrêmement drôle, rythmé et esthétiquement très réussi. On ne s’ennuie pas une seconde, notamment lors de ces multiples scènes de repas où l’écriture ciselée des dialogues est parfaitement rendue par des comédiens tous impeccables. Dans une interview de 2019, Monia Chokri disait que « contrer la gêne et le mal-être par l’humour, c’est ce que je préfère ». Et elle maîtrise parfaitement l’exercice.

Cette description de ces mondes socialement si distincts flirte toutefois avec le mépris de classe, quand bien même, redisons le, tout le monde en prend joyeusement pour son grade.

On pourrait également trouver à redire - et heureusement, le film est réalisé par une femme - sur une vision un peu caricaturale du désir féminin (qui pour le coup se met à ressembler au désir masculin). En effet, la femme retrouve une libido débordante et soumise face à un homme grand, beau, fort et viril, dépourvu de culture, quand elle se lasse par ailleurs d’un intellectuel forcément maigrichon. Les deux sont néanmoins aimants et à égalité dans leur désespoir.

Le film achevé, y avait-il un message ? A entendre Monia Chokri en entretien promotionnel parler du couple comme « système politique inégalitaire », peut-être, mais sans que cela nuise au plaisir de la projection, on a peiné à le retrouver dans le film.

Sébastien Bourdon

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.