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« Santosh » de Sandhya Suri

mardi 23 juillet 2024, par Sébastien Bourdon

Nocturne Indien

Dans le Nord de l’Inde, Santosh (Shahana Goswami), jeune veuve d’un officier de Police, est rejetée par sa belle-famille et goûte assez peu l’idée de retourner vivre chez ses parents. Elle découvre alors la loi dite du « recrutement compassionnel » qui lui permet de suivre son défunt mari dans la carrière de gardien de la paix (une drôle d’idée soit dit en passant).

Assez séduite par une voie qui lui offrira l’indépendance qu’elle recherche, Santosh se lance d’abord timidement. La conviction viendra à l’occasion d’une affaire de viol et d’assassinat d’une jeune intouchable. Le risque d’émeute ethnique oblige les autorités locales à faire appel à une figure féminine de la police (Sunita Rajwar) pour apaiser les foules, dont le charisme fera vite écho auprès de notre novice, nonobstant ses méthodes plus ou moins orthodoxes.

S’il y a parfois des ellipses, le film ne quitte jamais Santosh, rien ne se passe pour nous en dehors de sa présence. C’est bien une Inde grouillante qui nous est montrée, mais avec le regard d’un unique personnage : nous sommes collés aux basques de la fliquette et de ses tourments moraux. Il n’y a ainsi guère de distance avec ce qui se passe, et peu de plans larges.

S’il cultive une indiscutable et forte originalité, ne serait-ce que géographique, le film reprend nombre des codes du polar ou du thriller : la jeune et naïve recrue dont les illusions vont se défaire dans un monde violent et cruel.

Santosh voit ainsi sa relative candeur se cogner à une société raciste et misogyne, gangrenée par la lutte des castes. On est très loin de l’imagerie de Bollywood dans laquelle on tend à réduire le cinéma indien.

Avec une plus ou moins grande subtilité - la réalisatrice a parfois de gros sabots - le film se distingue toutefois de cette trame ultra classique : en réalité, on se fout un peu de connaître le coupable. Fait à défaut de pouvoir réaliser un documentaire, il s’agit ici de dénoncer sans ambages un pays corrompu, à la mentalité rétrograde.

Le sort des femmes (et des castes dites inférieures) occupe donc largement le film - victimes de violence, mais capables d’en commettre - et interroge sur la possibilité de trouver une voie d’émancipation qui ne soit pas un chemin de déchéance morale.

Admirablement filmé et photographié, dans une épure efficace (aucune musique ou presque), le film vous prend très vite à la gorge et met bien du temps avant de vous relâcher.

Sébastien Bourdon

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