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« Les Magnétiques » de Vincent Maël Cardona

dimanche 21 novembre 2021, par Sébastien Bourdon

Allemagne, année zéro

1981, dans un trou normand, deux frères travaillent dans le garage de leur père le jour et occupent leurs nuits en animant avec ferveur une radio amateur (Radio Warsaw).

Mitterrand vient d’être élu, Ian Curtis s’est pendu, la décennie a comme un parfum de nouveau monde, mais dont on sait déjà qu’il ressemblera beaucoup à l’ancien.

Les deux frères sont amoureux d’une même femme (Marie Colomb), apprentie coiffeuse parisienne échouée dans ce bled : on a déjà beaucoup filmé et écrit sur une telle trame, mais le réalisateur ne s’attarde pas en explications et détails, du moins ne s’appesantît pas ce qui fait ou défait ici les liens du cœur, préférant l’ellipse.

Le film cherche surtout à restituer une atmosphère et une époque et à évoquer dans ce cadre temporel (et analogique) un âge crucial de la vie, celui du plus jeune des deux frangins, Philippe (Timothée Robart). Sa fraîcheur se confronte à un monde où tout semble déjà un peu abîmé, les jeunes années 80 comme le fait d’avoir vingt ans dans une province sinistre.

Gauche mais gracieux, un peu paumé dans cet âge impossible, mû par deux soifs inextinguibles, la musique et une femme, il semble certes maladroitement empêché mais armé de la détermination des timides.

Il va se cogner un peu partout, essayant de prendre en main son destin, ayant conscience que sans quoi, ce serait la fin (évidemment).

Revisiter sur l’écran un temps récent est toujours périlleux, en ne cherchant pas forcément une reconstitution scrupuleuse, mais en s’attachant à l’atmosphère et à l’universalité des sentiments, Vincent Maël Cardona signe un film éminemment personnel.

D’une certaine manière, en réalisant son premier long-métrage à quarante ans, il fait montre de la maturité nécessaire à l’exposition de ce qu’il filme. Son personnage principal n’a pas beaucoup vécu, mais en accepte l’augure, quand celui qui le raconte à l’écran nous le montre avec le recul et l’empathie que lui donne l’expérience.

Il faut enfin mentionner une indéniable maîtrise du cadre et de la photographie qui ajoutent encore à une œuvre éminemment personnelle et particulièrement réussie.

Sébastien Bourdon

« Laissez chaque impression et chaque germe de sensibilité s’accomplir en vous, dans l’obscurité, dans l’indicible, l’inconscient, là où l’intelligence proprement dite n’atteint pas et laissez-les attendre, avec une humilité et une patience profondes, l’heure d’accoucher d’une nouvelle clarté. » Rainer Maria Rilke

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