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« La Mariée était en Noir » de François Truffaut (1968)
vendredi 12 juillet 2024, par
La Comtesse de Monte-Cristo
Le jour de ses noces, Julie Kohler (Jeanne Moreau) voit s’effondrer dans ses bras son tout juste époux, victime d’une balle perdue.
Cette mort se révélera être le fruit d’une conjugaison de cinq imbécilités masculines que la jeune veuve se fera fort de faire payer au prix fort : par la mort.
Adapté d’un roman de William Irish, ce film noir donne l’occasion à Truffaut de plonger ses références fétiches (Hitchcock et le polar) dans la Nouvelle Vague. Si l’on est là dans l’expression la plus pure du polar, ses protagonistes (à l’exception de la Némésis) dissertent en appartement de l’amour et des femmes (jusqu’à enregistrer le bruit que font les bas lorsque se croisent et se décroisent les jambes de l’être aimé).
L’hommage à Hitchcock a rarement été aussi appuyé - jusque dans le choix du compositeur, Bernard Hermann - et Truffaut multiplie les plans et séquences qui évoquent aussi bien « Vertigo » que « Pas de Printemps pour Marnie ».
Truffaut le disait lui-même, son film était en réalité double, comme si une œuvre américaine était prolongée d’une réflexion très européenne.
Éventuellement déconcertant, le film gagne à être revu. On peut en effet être d’abord rebuté par sa relative froideur, ainsi de l’énigmatique personnage principal et des odieux mâles qu’elle va s’employer à éradiquer, glaciation émotionnelle que la maîtrise technique favorise plus encore.
« La Mariée » est même presque dépourvu d’humour, chose assez rare chez François Truffaut.
Mais aussi brillant formellement qu’intellectuellement, ce film emporte le spectateur dans sa danse cruelle et absurde : tuer mécaniquement parce qu’on a cru à l’amour heureux, quelle admirable perversité !
Sébastien Bourdon