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« Johnny Guitar » de Nicholas Ray (1954)

vendredi 17 septembre 2021, par Sébastien Bourdon

Johnny’s got a gun

Il surgit dans le luxueux tripot désert comme un fantôme tremblant, stupéfiant la maîtresse des lieux, quand bien même cette dernière tente de n’en rien laisser paraître.

« Tell me something nice » dit l’homme (Sterling Hayden).

« Sure, what do you wan’t to hear ? » répond Vienna (Joan Crawford).

« Lie to me, tell me all these years you have waited for me. »

Et Vienna lui répète mot pour mot un amour qui ne se serait pas éteint malgré l’abandon, la distance et les années, comme celui auquel il veut encore croire.

Et la demande d’un mensonge réconfortant se transforme peu à peu chez elle en une déclaration d’un feu toujours vivace.

Nicholas Ray n’était pas franchement un spécialiste du western et il ne se prend d’ailleurs pas pour John Ford. Pas de grands espaces ici, mais des paysages resserrés et rendus étouffants par de sourdes menaces : sur les sentiments plane l’usure du temps évidemment, mais sur cela comme le reste, c’est surtout la violence et la mort qui rôdent.

C’est en effet un monde en rupture qu’habitent ces êtres éperdus. Le chemin de fer arrive bientôt, les collines explosent sous la dynamite pour lui faire passage. Le péril vient donc symboliquement du décor qui lui-même se délite, mais aussi de la foule qui, comme le capitalisme, a le goût du sang.

Le mal est toutefois ici comme atone, toujours de noir vêtu, sinistre à l’extrême, mécaniquement destructeur. Face à la sombre meute, l’héroïne, Vienna - ce n’est évidemment nullement crédible mais ça n’a aucune importance - n’est vêtue que de couleurs hurlantes : un blanc immaculé pour incarner son innocence aux yeux de ceux qui viennent la pendre, un rouge ou un jaune flamboyants pour symboliser l’intensité de sa personne ou le désir brûlant qui l’habite.

Dans chaque camp, une femme mène sa danse, amoureuse ou enragée, dans un western où les hommes ne sont que des petits bonhommes avec des revolvers. Le seul qui ait un tant soit peu de cœur a une guitare en bandoulière.

Sébastien Bourdon

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