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« Bohemian Rhapsody » de Bryan Singer

dimanche 2 décembre 2018, par Sébastien Bourdon

Having A Good Time

Eut un temps, celui de ma jeunesse, le groupe Queen régnait sur le monde du son et de l’image. Ce groupe a pratiquement fait MTV, couplant des hymnes de stade avec des clips absolument décoiffants (l’archétype étant celui de « I Want to Break Free »).

Non content de truster les médias, ce quatuor anglais pouvait également tenir dans la paume de leurs mains un stade, comme lors d’un concert à la réputation non usurpée, le Live Aid à Wembley (1985) qui ouvre et conclut le film dont il est ici question.

Ne nous voilons pas la face, si le groupe contenait des musiciens sérieux et imaginatifs, l’ensemble reposait surtout sur son chanteur, Freddie Mercury, interprète qu’il serait vain de tenter d’imiter, quand l’égaler serait de toute façon peine perdue.

Voix, présence, charisme, physique hors normes, nonobstant la difficulté, la tentation hollywoodienne de faire un biopic de cette vie trop tôt interrompue était irrésistible. C’est Bryan Singer qui a hérité de l’encombrant défi (il a toutefois été débarqué sans pouvoir finir le film, mais a conservé le droit de le signer). Ce réalisateur, surtout connu pour mettre en scène des super-héros, était sur le papier le bon choix : Freddie Mercury portait des vêtements moulants et voulait crever le ciel.

Partant du principe que le biopic est sans doute le genre cinématographique le plus casse-gueule qui soit, le cinéaste allait se colleter au surplus avec des écueils sérieux.

Tout d’abord, mettre en scène des événements récents sur un type « bigger than life » que personne n’a oublié.

Ensuite et plus ardu encore, filmer la musique et plus précisément le processus créatif, sans se noyer dans le contexte émotionnel tourmenté des frasques de Freddie.

Commençons par ce qui pèche, ce que le réalisateur n’a su contourner, c’est-à-dire les inévitables travers du genre sus-évoqué : condenser des événements s’étalant sur un temps relativement long en quelques scènes chargées aux détails sur signifiants, parfois à la limite du supportable.

La musique de Queen ne s’embarrassait certes pas toujours de nuances et Singer est au diapason quand il s’agit d’expliquer la personnalité du chanteur. En réalité Mercury était à l’image de beaucoup de ses compositions, subtilement complexe.

Ce qui nous amène à l’interprète, Rami Malek, qui a certes beaucoup travaillé et ça se voit, mais pour citer un fan de mes amis, « il lui manque dans le jeu, au même titre que dans la manière de raconter l’histoire, l’immense malice qui caractérisait Freddie et qui illuminait son regard ». L’acteur a en effet le plus souvent un oeil d’épagneul agité ou perdu se révélant infiniment plus convaincant avec des Aviator sur le nez.

Mais, pour décrire comment la musique vient à l’homme, le film réussit quelques belles scènes, en plus de celles, très réussies, de concerts.

Ainsi, c’est un jeune Freddie qui entre dans un bar, gauche et intimidé, commande une bière et qui, au son de la guitare jouée sur scène, s’illumine progressivement et dont on sent que son existence se joue à cet exact moment.

Enfin, le film ne trahit pas les interprètes - de la musique - et l’amateur de Queen ne se sentira pas floué tant les compositions sont respectées : l’on entend seulement les versions originales et le plus souvent en entier.

L’écoute à plein volume de cette musique si vivante, au chaud dans une salle de cinéma, est un plaisir vibrant, communicatif, et pour l’avoir vérifié, d’au moins 7 à 77 ans.

Aujourd’hui, Queen tourne toujours, sans le bassiste John Deacon qui a renoncé, le défunt Freddie étant remplacé par un chanteur extrait du télé-crochet « The Voice ». L’époque n’a que ce qu’elle mérite.

Sébastien Bourdon

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