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ANATHEMA, 4 octobre 2017, le Bataclan

mardi 10 octobre 2017, par Sébastien Bourdon

Anathema, le Bataclan, 4 octobre 2017

Attention, les oreilles travaillées par le noise ou le black metal norvégien pourront trouver la soirée crispante tant Anathema prend peu le risque de l’agression sonore, préférant la mélopée scintillante et l’arrangement délicat. Seul reliquat de la scène à laquelle ils appartiennent (je veux dire, ces gens se produisent parfois au Hellfest), les montées en puissance, que ne quittent néanmoins jamais la grâce et l’harmonie.

Quelle sensation étrange que de retrouver le Bataclan. Il est désormais impossible de s’y rendre comme si de rien n’était. C’est le même endroit, mais c’est un tout autre. Et il y a une indiscutable grâce à ne pas avoir coupé la musique en ces lieux.

On a raté la première partie, Alcest, on ne saura donc pas si ce groupe a un quelconque rapport avec un petit garçon enrobé, aux mains grasses de tenir des viennoiseries dont il ne se sépare que pour les ingérer.

On a donc débuté cette soirée par la tête d’affiche, qui a une fois de plus démontré sa déconcertante capacité à faire mieux à chaque disque, en le confirmant scéniquement, ce qui ne gâte rien. Que dire ainsi de l’enchaînement des deux parties du morceau « Untouchable » joué pratiquement en ouverture du concert ? Pas grand chose sans doute, si ce n’est qu’on s’est senti traversé par la plus belle musique possible, au moins un court instant, et que cela nous a laissé presque tremblant.

Le dernier album d’Anathema, « The Optimist », est une merveille que le groupe n’a, à raison, aucun scrupule à largement défendre sur les routes. Des titres comme « Springfield  » ou « Can’t let go » font entrer dans la transe un public qui montera en joie comme le groupe en progression d’accords.

Tout ne se vaut toutefois pas et certains morceaux donnent parfois l’impression de se chercher une issue. Le phénomène est particulièrement prégnant quand la divine chanteuse Lee Douglas quitte momentanément la scène, Anathema redevient alors un peu ce qu’il a dû être autrefois, un groupe de garçons talentueux mais un peu patauds qui se sentait des envies de rock progressif. Pour ainsi dire, ils vont alors jusqu’à croire qu’ils pourraient faire danser la salle (« Closer » qui sonne comme un morceau de Air littéralement interminable).

Élégamment, Daniel Cavanagh (guitare, claviers) déclare « It’s a privilege to be here, in this beautiful venue ». Ce propos discret alors que le concert est déjà bien entamé ne manque pas d’élégance et aurait pu suffire à traduire notre diffus ressenti.

Toutefois, un peu plus tard dans une salle seulement éclairée des torches de nos téléphones portables, le groupe jouera « A Natural Disaster » en hommage aux victimes de la mâle et idolâtre imbécillité, les noms des défunts du 13 novembre affichés sur l’arrière de la scène.

J’en connais une qui a vu là quelque chose de nature à forcer des sensations que l’on avait déjà, sans qu’elles aient besoin d’être plus appuyées. Mais j’entendais l’autre jour Le Clezio causer dans le poste et y affirmer que pour ne pas oublier, il faut dire et écrire, encore et toujours. Difficile de trancher, chacun se fera son idée et, pour le reste, pardonnera aux artistes leurs excès d’enthousiasme jusqu’à la relative candeur.

On pourra enfin se dire que ces lieux meurtris ont été ce soir là bien joliment célébrés en cette forme si essentielle et singulière : la musique.

Sébastien Bourdon

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