Blues Funeral
C’est au milieu de la nuit qu’il faudrait évoquer Mark Lanegan, c’est un temps qui lui va bien. Comme ses comparses déjà morts, dont certains depuis belle lurette - Kurt, Layne ou Chris - on l’a découvert quand nous étions si jeunes.
S’agissant de ce dernier à rejoindre le territoire des ombres (à 57 ans), il nous était à l’époque d’abord apparu moins immédiatement évident à appréhender que les autres.
Au contraire de ses pairs, jeunes et fougueux et hurlant une saine révolte, il semblait (...)
Articles les plus récents
-
Mark Lanegan 1964 - 2022
24 février, par Sébastien Bourdon -
« Fargo » de Joël et Ethan Coen (1996) - ciné-concert par Fragments - espace 1789 le 15 février 2022
16 février, par Sébastien BourdonIl est devenu assez fréquent que de voir revisitée une œuvre du patrimoine cinématographique avec force instrumentation plus ou moins contemporaine. Une logique implacable fait le plus souvent se porter cet effort musical et créatif vers des films muets, qui trouvent dans cet accompagnement mélomane une nouvelle vitalité.
S’agissant de « Fargo », film plus récent (1996) et à la renommée aussi intacte qu’encore vive, l’exercice interrogeait : ces images si marquantes, cette atmosphère si prégnante, les (...) -
« Vous ne Désirez que Moi » de Claire Simon
12 février, par Sébastien BourdonL’amant
Quelles voies impénétrables et mystérieuses suit le sentiment amoureux ? Comment un jeune homosexuel s’éprend éperdument de Marguerite Duras alors sexagénaire, jusqu’à presque s’auto-annihiler dans cette relation ?
Bien sûr, il y a la littérature, et tout doit lui être permis, mais elle est insuffisante ici à expliquer un tel attachement passionnel. Aimer les mots de l’écrivain ne pousse pas forcément à une adhésion fusionnelle à l’auteur.
Adaptation pour deux acteurs (Emmanuelle Devos et Swann (...) -
« Red Rocket » de Sean Baker
9 février, par Sébastien BourdonLittle Red Rooster
C’est un homme démuni, fatigué et couvert de bleus qui descend d’un de ces bus qui traverse le territoire américain. Le dernier arrêt est un bourg du Texas dont Mikey (Simon Rex) est originaire où il va tenter de se refaire. Il ne semble avoir pour seule possession que son jeans et son débardeur sale, mais il a pour lui une belle gueule et un sacré bagout. Il se pointe chez sa femme, qui commence par le rejeter avec vivacité et conviction, comme on le ferait de quelqu’un qui (...) -
« Jane par Charlotte » de Charlotte Gainsbourg
3 février, par Sébastien BourdonMoi Charlotte, toi Jane
A quel moment un film de famille devient du cinéma, peut-être presque immédiatement lorsqu’il s’agit de filmer, voire de mettre en scène, des gens tant habitués aux sirènes de la célébrité que leur seule présence à l’image nous écarte définitivement du banal. Rien n’est anodin chez ces gens, et depuis si longtemps.
Pourtant Charlotte Gainsbourg ne cède pas à cette facilité, elle va au-delà des trompettes de la renommée pour chercher avec sa caméra l’anecdotique comme l’universel, ce (...) -
« Ouistreham » d’Emmanuel Carrère
26 janvier, par Sébastien BourdonRester à Quai
L’exercice était nécessairement périlleux : un écrivain renommé - Emmanuel Carrère - adapte pour le cinéma un ouvrage à succès d’une journaliste non moins célèbre - Florence Aubenas.
Pour ceux qui l’auraient oublié, ladite Aubenas s’était faite passer pendant plusieurs mois pour une chômeuse en perte de droits, désespérant de trouver des contrats de travail à temps très partiel, pour témoigner au plus près de la réalité de la précarité qui frappe nombre de nos semblables.
Sa recherche d’heures (...) -
« Licorice Pizza » de Paul Thomas Anderson
22 janvier, par Sébastien BourdonMuch Ado About Nothing
Paul Thomas Anderson se regarde filmer et il semble que cela plaise. Pourtant, on a beau immanquablement essayer, on n’y arrive point : il nous apparaît comme un cinéaste talentueux qui, sous un vernis impeccablement appliqué, fait surtout des films sans intérêt (quand ils ne sont pas franchement déplaisants, comme « Phantom Thread » - 2018).
Le phénomène était particulièrement prégnant avec « There Will Be Blood » (2007) où la volonté acharnée de produire des effets d’image et (...) -
« En Quatrième Vitesse » de Robert Aldrich (1955)
19 janvier, par Sébastien BourdonMike Hammer (Ralph Meeker) erre dans une ville vide, il ne cesse d’ouvrir des portes, de monter et descendre des escaliers, qui ne révèlent que des voies sans issues.
Il n’y a aucune connexion entre les lieux, ce qui compte, comme au théâtre, c’est l’immédiateté du moment, de la scène, il n’y a rien derrière le décor.
On est d’ailleurs plongé dans cette évidence dès l’ouverture du film : la nuit, les pieds nus d’une femme qui court sur une autoroute qui ne mène nulle part. Intensité de l’instant, on ne sait (...) -
« Tromperie » d’Arnaud Desplechin
10 janvier, par Sébastien BourdonPerversité du Verbe
Philip est un écrivain juif américain, exilé à Londres (Denis Podalydès). Voilà un homme qui a réussi dans son art, qui vit confortablement, mais que la quête de l’écriture ne cesse d’habiter. Tout tourne autour de cela et ses relations amoureuses en constituent l’indiscutable ferment.
Terriblement littéraire, le film se divise logiquement en chapitres. Si son aventure avec une jeune femme mariée (Léa Seydoux) constitue le point d’ancrage, d’autres femmes pour d’autres histoires (...) -
La Femme qui Ecrit (Vicky Krieps)
8 janvier, par Sébastien BourdonC’est comme serveuse dans un Bed & Breakfast que l’on a vu pour la première fois apparaître Vicky Krieps à l’écran : l’air de ne pas y toucher, sourire énigmatique, une discrétion telle qu’elle prend toute la place, qu’elle fait présence immédiate (« Phantom Thread » de Paul Thomas Anderson - 2017).
La même actrice a récemment semblé plus encore déborder la simple interprétation de rôles. Elle s’est trouvée par deux fois en position d’intrinsèquement interroger le processus même de création, comme dans une (...)