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« Les Révoltés de l’an 2000 » de Narciso Ibáñez Serrador (1976)

mardi 20 mai 2025, par Sébastien Bourdon

Attention Enfants

L’ouverture du film est aussi éprouvante que déconcertante : est projeté pendant le générique un montage d’archives des carnages de la deuxième partie du 20ème siècle. Est conservé pour l’occasion un propos un peu lénifiant venant rappeler l’infernale répétition des crimes de masse et combien les enfants en sont les éternelles premières victimes.

Fondu enchaîné et on se retrouve au bord de la mer, en Espagne, sur une plage bondée de touristes, avec la sensation diffuse de ce que ces heureuses images de consommation capitaliste ne sont que l’envers d’un décor autrement plus terrifiant.

Un couple d’anglais débarque dans la station balnéaire avec l’idée de la quitter promptement pour poursuivre leur séjour sur une île au large, à la réputation plus paisible.

Après quelques heures de mer en solitaire, ils débarquent sur Almanzora, accueillis par des enfants pour le moins patibulaires. Cet accueil froid, presque silencieux, ne semble pas, et à juste titre, augurer du meilleur.

Le couple pénètre plus profondément dans le petit port, pour n’y découvrir que des rues désertes écrasées par le soleil, avant que ce mystère ne trouve une explication aussi effrayante qu’énigmatique.

S’il rejoint des œuvres littéraires comme « Sa Majesté des Mouches » (William Golding - 1954) ou cinématographiques comme « La Nuit des Morts-vivants » (Georges Romero -1968) ou « Les Oiseaux » (Alfred Hitchcock - 1963), le film espagnol se distingue par son propos et sa forme inattendus.

Ainsi de sa violence essentiellement elliptique - ne serait-ce que parce qu’il eut été délicat d’associer frontalement les enfants acteurs aux horreurs que commettent leurs personnages - laissant de facto les abominations hors champ.

Il n’en reste pas moins glaçant, ce qui est d’autant plus frappant que le film se déroule essentiellement en plein jour, sous un soleil de plomb.

Le titre français - absurde et sans lien évident avec le scénario - ne dit rien du dilemme moral auquel vont être exposés les protagonistes dans ce qui prend rapidement l’allure d’un « survival » : « Quien puede matar a un niño ? » (« Qui peut tuer un enfant ? »). L’intitulé original est donc autrement plus limpide sur ce qui se trame à l’écran, et qui est évidemment terrifiant.

Sébastien Bourdon