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Voyageur Immobile

"Comme un Avion" de Bruno Podalydès

lundi 6 juillet 2015, par Sébastien Bourdon

« Comme un Avion » de Bruno Podalydès

Commençons par le meilleur, voilà longtemps que l’on n’avait pas autant ri dans une salle de cinéma. Avec une grâce propre au sujet, pagayer pour s’évader, le cinéaste nous amène souvent à l’hilarité, mais avec une élégance de tous les instants.

Michel, un homme d’une petite cinquantaine d’années (interprété par le réalisateur), bien installé dans une existence douillette, matériellement comme émotionnellement, sentant que les années filent et en concevant un très léger état dépressif, opte pour l’évasion par une forme de retour à l’enfance et à ses rêveries.

En effet, Michel, depuis tout petit, rêve de l’Aéropostale et de ses exploits. Lucide, n’est pas Saint-Exupéry qui veut, et puis il se fait un peu tard dans un monde trop vieux, il va se rabattre sur le kayak (palindrome). Un avion sans ailes donc, comme dans la chanson de Charlélie Couture.

A l’image de cette douce et bien inoffensive rêverie, le début du film semble porté par la grâce, la présence de Sandrine Kiberlain, « lumineuse », y étant sans doute pour beaucoup. Il est difficile de ne pas croire à la réalité attachante de ce couple tant tout chez eux semble juste, des gestes aux propos.

S’il en est pour trouver de l’intérêt à la description d’un couple bourgeois, plus si jeune, charmant et subtilement branlant, le film est pour eux.

Après avoir longuement préparé son expédition, notre un brin pathétique héros prend finalement son envol, ou plus exactement se jette à l’eau, pour une longue promenade en kayak en solitaire à l’occasion d’une semaine de congés. Il semble à cette occasion avoir autant de mal que nous à laisser Sandrine Kiberlain sur le bord de la rivière.

Sans en révéler trop, notre lecteur du manuel des Castors Juniors et de « Vol de Nuit » (une fois n’est pas coutume, Tintin est peu cité dans un film de Podalydès), va peiner à vivre la grande aventure, ses coups de rames le ramenant invariablement aux mêmes lieux et aux mêmes gens.

Bruno Podalydès n’entend certes pas donner une forme documentaire à cette crise de la cinquantaine et donc, dans ce cadre, maitrise comme toujours parfaitement la subtile alchimie d’un balancier continu entre rêve éveillé et réalité.

Si la première partie du film souffre difficilement la moindre critique, la suite de l’œuvre paraît moins maîtrisée, mais sans cesser d’être drôle et pour le moins gracieuse. Bruno Podalydès semble ainsi, une fois les caractères bien campés, à l’instar du personnage qu’il incarne, patiner un peu (nous n’évoluons pourtant pas sur la forme solide de l’eau). Le phénomène était identique dans son précédent opus (http://www.soundsmag.org/Qu-est-ce-que-vouloir). Le héros du film ne sait plus très bien où il va, et même s’il doit aller quelque part, et on se demande si le cinéaste ne se pose pas la même question.

Mais, comme les personnages du film, on se laisserait volontiers aller aux plaisirs de la chair et de la bonne chère, à l’abri d’un écrin de verdure. On peut aussi trouver que cela manque d’ambition, face au temps qui passe et au chaos ambiant, Bruno Podalydès semble ne rien vouloir demander de plus à l’existence que la réhabilitation des guinguettes parce que « c’est agréable de boire un petit coup au bord de l’eau ».

Sébastien Bourdon

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