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« Vingt Dieux » de Louise Courvoisier

lundi 30 décembre 2024, par Sébastien Bourdon

Sol Invictus

On taxe parfois le cinéma d’auteur français d’être germanopratin, ici nous sommes loin de Paris et de ses frasques, puisque dans un monde purement paysan, au cœur du Jura.

Si contemporain soit le film, surgissent très exceptionnellement des téléphones portables, mais leur rareté s’explique probablement par l’absence de réseau dans ces contrées rurales.

La caméra s’attache aux basques des gens d’ici, et plus particulièrement à celles d’Anthony dit « Totone » (Clément Favreau). Du genre branleur à peine majeur, le garçon traîne avec ses potes, entre journées à fuir le travail et soirées à boire trop avant de courir les filles.

Comme tout le monde ici, son père solitaire fait dans le comté, avec la rude vie agricole qui va avec. Un soir d’excès de boisson, il se tue en voiture, laissant Totone et sa petite sœur seuls, face à un horizon quelque peu bouché.

S’il dissimule férocement sa sensibilité et son intelligence, Totone a de la ressource et, après quelques errements, se lance avec énergie dans la fabrication du fromage local, par familiarité avec le produit et faute d’idée plus originale.

Évidemment, rien ne sera simple, et sa maladresse comme sa naïveté entraîneront bien des déconvenues au cours de cette entrée un peu forcée dans l’âge adulte.

Le film s’ouvre par un long plan séquence dans une fête de village baignée de soleil. Ce premier mouvement nous laisse immédiatement deviner que la jeune réalisatrice maîtrise son propos : elle nous plonge immédiatement au cœur d’un lieu et de ceux qui l’habitent (et où elle vit), avant de finalement s’arrêter sur celui qui en sera le principal protagoniste.

Cette formidable ouverture augure du meilleur, qui ne cesse ensuite d’advenir : de la photographie à la narration, en passant par le jeu des acteurs non professionnels, aucune faiblesse n’est à relever dans ce premier film.

En s’attachant à la description fine et sensible d’une masculinité que l’on pourrait par raccourci qualifier de « toxique », Louise Courvoisier fait le portrait délicat d’un garçon un peu perdu, que le surgissement du sentiment amoureux et l’attention d’une femme vont révéler à lui-même.

Il faut le voir chevauchant sa moto dans la lumière d’un jour d’été, portant sur le dos sa meule de comté, soleil symbolique qu’il va délivrer à la femme aimée, comme un geste annonciateur et inespéré de lendemains qui chantent.

Sébastien Bourdon

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