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« Vincent Lindon - Cœur Sanglant » de Thierry Demaizière et Alban Teurlai
vendredi 7 février 2025, par
À cœur vaillant…
Ceux qui n’apprécient guère l’acteur devront détourner leur chemin, il n’y en a que pour lui dans ce documentaire. Son omniprésence va même au-delà de ce qu’imposerait l’exercice : personne d’autre que lui n’apparaît à l’image, à l’exception de quelques ombres de rue ou de plateaux de tournage.
Bien sûr, Vincent parle à quelqu’un placé hors caméra, il semble répondre à des questions, mais que l’on n’entend pas. Et puis la machine s’emballe, tremblante mais décidée, Vincent cause, diverge et divague, mais ne tourne qu’autour de lui-même.
Il se déteste, tout en se contredisant sans cesse, on est à la limite de la schizophrénie, il a toujours un autre lui-même pour revaloriser son premier propos : Vincent sauve lui-même… par lui-même.
Son angoisse de la mort est une expression de la peur de disparaître de la surface : m’aimerez-vous toujours quand je ne serai plus là ?
C’est une véritable force de caractère que démontre cet homme sinistre qui hurle sa solitude et son dégoût de lui-même, sans jamais oublier de se couvrir de louanges. Il ne manque que l’absinthe pour faire romantique du 19ème (le siècle, pas l’arrondissement).
C’est évidemment subjectif, mais l’homme reste étonnamment attachant, ne serait-ce que parce que cet étalage impudique recèle de véritables saillies poétiques. Et de moments parfaitement ridicules aussi, avec ses sorties d’enfant gâté qui se plaint de ce que personne ne l’aide (l’aime) tout en hurlant sa farouche indépendance (je est son double, invariablement).
Si on dépasse le personnage pour s’intéresser aussi à l’objet, on a là un documentaire introspectif qui se révèle passionnant. Travail de longue haleine, extrêmement subtil dans son montage et sa mise en scène, il vous tient donc aussi par sa forme.
Film aussi embarrassant que passionnant, cet étalage narcissique se révèle assez attractif pour en bouffer jusqu’à la dernière minute.
Sébastien Bourdon