« Les Règles de l’Art » de Dominique Baumard

Yonathan, un expert en montres, sympathique mais terne (Melvin Poupaud), fait une rencontre qui se révélera inopportune en croisant le chemin d’Eric, un magouilleur de première (Sofiane Zermani). Embobiné et charmé par le bonhomme, Yonathan se laisse porter, grisé par cette amitié inédite dans son existence, sans réaliser la part de manipulation qui est à l’œuvre.

Factotum d’Eric, un monte-en-l’air discret (Steve Tientcheu), réalise un vol de toiles de maîtres d’une main qui ne l’est pas moins. Cette montée en grade dans la rapine va projeter les trois larrons dans une aventure rocambolesque et calamiteuse.

Inspiré du célèbre casse opéré en 2010 au musée d’Art moderne de la Ville de Paris (cinq toiles du XXe siècle pour un montant estimé de 100 millions d’Euros), le film prend le parti d’en rire gentiment.

Il est indéniable que les faits de l’espèce - dont on ne dira point trop ici - faisaient matière à une comédie, tant absurdes furent les comportements des protagonistes.

Le film est rigolo, mais pour être proprement hilarant, il aurait fallu lui donner plus de rythme. Il n’en reste pas moins éminemment sympathique, porté par une interprétation extrêmement fine : Zermani a une tchatche infernale et Poupaud fait un inhabituel mais parfait couillon.

Mais le plus réussi du film tient surtout dans cette manière de montrer comment un être parvient à en happer un autre, en lui faisant ensuite à peu près faire ce qu’il veut.

Ce type de rapport a souvent fait matière cinématographique et littéraire dans le genre « noir », la transe passionnelle et amoureuse menant au crime, aussi sûrement que le facteur sonne toujours deux fois.

Ici, c’est une ivresse amicale, peut-être un peu trouble, et qui fait penser à la comédie, notamment italienne (« Le Fanfaron  » de Dino Risi), où la toxicité du rapport naît chez ceux qui, encombrés d’eux-mêmes, ne savent pas dire non, permettant de les phagocyter habilement.

Sébastien Bourdon