Accueil > Francais > Cinéma > « Truffaut - Correspondance », mise en scène de Judith d’Aleazzo et David (…)
« Truffaut - Correspondance », mise en scène de Judith d’Aleazzo et David Nathanson - Le Lucernaire
dimanche 22 septembre 2024, par
Le Cinéaste Épistolaire
La petite scène ressemble à un bureau mal rangé, entre vieux livres et revues éparses (« Les Cahiers du Cinéma » of course), un pianiste joue, et le comédien interprète (David Nathanson).
L’exercice n’est pas aisé, est-ce que cela se joue une lettre, comment interpréter ce qu’un autre a longuement et posément couché sur papier, avant de refermer l’enveloppe et de la poster ?
Il en existe des palanquées de lettres de François Truffaut, un gros livre de poche en a livré une bonne part aux lecteurs. En sélectionner quelques unes pour une heure et quart de spectacle nécessite d’opérer un choix arbitraire.
Là-dessus on pourrait évidemment trouver à redire, surtout si on connaît un peu le sujet. On reconnaîtra néanmoins l’effort fait pour dessiner un portrait assez complet du personnage, public et privé (même si le grand séducteur qu’il fut est un peu escamoté, c’est moins dans l’air du temps il faut dire).
On retrouve ainsi François dans ses colères et ses affections : le cinéaste, l’ami, le père, mais aussi l’artiste, le lecteur, le cinéphile, le citoyen et en tout cela, l’homme obnubilé par la liberté et l’enfant massacré.
On ne s’étonne donc guère de ses lettres à Souchon, pleines de drôlerie et d’empathie, ou de celles adressées à ses filles, débordant d’une affection d’autant plus forte qu’à leur âge, elle lui était inconnue.
Pouvant être excessif jusqu’à être odieux, François Truffaut était aussi un homme plein de rancœur et de rancune, cette dernière s’exprimant à fleurets pas du tout mouchetés lorsqu’il écrit à Godard ou à son beau-père, Roland Truffaut. Ne pas nous épargner ce côté obscur du personnage fait le sel du spectacle, nullement panégyrique.
Si on l’a longuement côtoyé, on ne l’y retrouve pas forcément comme on le voudrait, ou du moins voudrait-on plonger plus encore dans des aspects nous paraissant plus essentiels (le cinéaste au travail). N’empêche, faire entendre encore et toujours sa voix, c’est une joie (et une souffrance).
« Chez les morts j’ai beaucoup d’amis » Yasmina Reza
Sébastien Bourdon