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« Jouer avec le Feu » de Delphine et Muriel Coulin
mardi 11 février 2025, par
Le Fils Préféré
Dans une Moselle prolétaire, mais pas forcément misérabiliste, Pierre (Vincent Lindon), cheminot de son état, élève seul ses deux fils, après le décès de leur mère. Si le cadet (Stefan Crepon), élève studieux et impliqué, ne pose pas de difficultés, la situation diffère un peu avec l’aîné (Benjamin Voisin).
Au sein du foyer, le trio masculin est pourtant aimant et complice, mais les influences extérieures de l’un vont faire basculer leurs vies à tous.
En effet, Fus végète dans ses études et traîne avec des ultras, donnant du fil à retordre à son géniteur qui voit ce virage politique comme une trahison. La possibilité de la violence envahit alors l’espace.
C’est un monde sans femmes qui nous est montré par les deux réalisatrices (et sœurs) Delphine et Muriel Coulin, mais sans jugement toutefois, ces hommes ne sont pas intrinsèquement toxiques. Ainsi de ce père qui n’a jamais été animé que par les meilleures intentions.
Las, les attachements et les égarements sont inéluctables, la violence est au cœur de l’homme, comme dans un roman noir (mais sans « femme fatale » pour les déclencher et en accélérer le cours).
Dans la veine sociale du cinéma français contemporain, ce film ne s’inscrit pas nécessairement parmi les meilleurs du lot, ne serait-ce que parce que son scénario est un peu prévisible.
Plus souciant, on peine parfois à comprendre par quels ressorts sont mus les personnages (adapté d’un roman, le livre était peut-être plus didactique et compréhensible).
Mais on ne saurait jeter le bébé avec l’eau du bassin (minier), tant le film recèle d’indéniables qualités, à commencer par sa mise en scène. Sont ainsi parfaitement appropriés les espaces, comme éléments du décor destinés à accompagner les déplacements des protagonistes : le père sur sa voie de chemin de fer, progressant avec sa lampe torche, le fils qui se meut nuitamment au cœur du domicile, escaladant les rampes d’escalier etc.
Cette élégance dans la manière de capter le mouvement est servie de surcroît par une très belle photographie (et des comédiens tous remarquables), sauvant le film de ses quelques fragilités et lourdeurs.
Sébastien Bourdon