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« Testament » de Denys Arcand

dimanche 26 novembre 2023, par Sébastien Bourdon

Cry Macho

Jean-Michel Bouchard (Rémy Girard) essaye de vivre heureux en attendant sa mort, qu’il imagine prochaine. Archiviste en pré-retraite, il coule des jours paisibles dans un état de dépression douce, convaincu de la vacuité des choses, et particulièrement de l’époque. Il loge au sein d’une coquette résidence pour personnes âgées, tenue de main de maître par la tenancière, Suzanne Francoeur (Sophie Lorain), qui n’usurpe pas son patronyme, dissimulant sous sa relative sécheresse un immense besoin d’affection.

Notre mâle septuagénaire contemple donc avec un abattement paisible un monde qui lui semble de plus en plus éloigné du réel et de ses convictions, entre hypocrisie politique et hystérie idéologique.

Évidemment, la vie trouve toujours un peu le chemin et l’hostilité militante contemporaine s’approchant des marches de l’institution qui les héberge, va gentiment rapprocher nos protagonistes, réinsufflant un peu de ce satané espoir dans ces carcasses fatiguées.

Denys Arkand s’expose avec ce nouveau film à l’accusation convenue de « boomer » cacochyme (et ce d’autant que le personnage principal est plus que probablement son alter ego). Le risque est d’autant plus grand qu’une des séquences d’ouverture se révèle gênante tant gros dont les sabots empruntés : une remise de prix littéraire où ne gagnent que des femmes, incarnant chacune une cause du moment avec une agressivité outrée (la lesbienne militante, la nymphomane combattante ou la femme voilée revêche).

Heureusement, la suite du film verse plus subtilement dans la drôlerie et la mélancolie, surfant plus habilement avec un ton satirique moins grossier.

L’invasion du parking de l’établissement par une petite troupe militante de jeunes anglophones (forcément), décidés à faire éradiquer des murs de l’hospice chic une peinture ancienne et naïve, va servir d’élément déclencheur. Ladite œuvre picturale représente l’accueil hypocrite fait par les colons européens aux populations indiennes locales, avant le massacre qui s’en est ensuivi. Cette peinture datée, dans le temps comme dans le style, va cristalliser les tensions contemporaines, le réalisateur prenant soin de faire montre de l’ignorance crasse des uns face à la démagogie des autres, pour des luttes qui finissent par ne servir personne.

On peut trouver ça outré, caricatural ou réactionnaire, c’est selon, mais au final le film est drôle et n’est dénué ni de charme, ni d’esprit.

Sébastien Bourdon

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