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« Quatre Mouches de Velours Gris » de Dario Argento (1971)

mardi 22 décembre 2020, par Sébastien Bourdon

Fly on a Windshield

L’ouverture du film se fait sur une batterie, ne sont d’abord filmés que les toms et les baguettes qui les malmènent. Puis tout le groupe s’engouffre dans le groove puissant du batteur.

Regarder ce célèbre giallo de Dario Argento relève ainsi plus du trip psychédélique que de la plongée dans l’effroi. Pour ce faire, même l’histoire va d’ailleurs user de personnages typiques de l’époque, c’est-à-dire de musiciens de rock, véritable obsession du réalisateur et de son scénariste (Luigi Cozzi).

Le héros, Tobias (Michael Brandon), est donc un batteur professionnel, victime d’un étrange personnage qui le suit en permanence. Lassé de ce manège, il finit par inverser les rôles et se précipite à sa poursuite, de nuit. Dans un théâtre désert, la tragédie se noue devant la scène, puisque sans réellement le vouloir, il le poignarde. Un étrange personnage au masque de poupin inquiétant photographie la scène, puis se met à son tour à harceler l’infortuné percussionniste.

Mais le film ne s’enferme pas dans un carcan scenaristique, et multiplie les errances et digressions (comme dans un cauchemar), grâce notamment à un montage créatif et sacrément audacieux. La monteuse (Françoise Bonnot) a disposé pour ce faire des images et de la vision d’Argento et c’est ainsi que s’enchaînent des séquences aussi surprenantes techniquement que colorées. La musique d’Ennio Morricone rythme le tout, mais sons et images flirtent avec le free jazz.

Le film est donc libre, s’abandonnant à une créativité débridée parfois jusqu’au déconcertant : moments de pure terreur dans un jardin d’enfants soudain déserté avec la nuit qui tombe en un saut de plan, érotisme soft de salle de bains (Francine Racette), errances dans une ville magnifique (Turin mais probablement d’autres, Argento reconstruisant toujours une ville italienne qui n’existe que dans sa tête à partir de plans de plusieurs), hilarants moments de comédie italienne (le salon international du cercueil) etc. Ce qui en fait le sel est que cela s’enchaîne sans prévenir. Le rire, le drame ou la peur se succèdent brusquement, en véritable allégorie de l’existence.

Si le comédien principal a un charisme très relatif (ce film fut probablement le seul notable de sa carrière), son jeu colle finalement assez bien à cette sensation de rêve éveillé, d’être pris comme une mouche dans du miel : la sensation est sucrée, mais elle est mortelle.

On relèvera pour finir une exceptionnelle prestation de Jean-Pierre Marielle en détective homosexuel, se jouant des clichés du genre comme du métier, puisqu’il se vante notamment de n’avoir jamais résolu une seule affaire.

Sébastien Bourdon

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