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« Novembre » de Cédric Jimenez

jeudi 27 octobre 2022, par Sébastien Bourdon

Des Hommes à Abattre

Le film nous épargne tout de suite une chose fondamentale et essentielle, une reconstitution cinématographique des attentats du 13 novembre. Il y a là une pudeur aussi inattendue que nécessaire (même si évidemment, c’est un propos sous-jacent, en filigrane). La violence insoutenable de cette soirée du 13 novembre 2015 se résume ici à des téléphones qui sonnent, en nombre, soudainement. Cela fait d’ailleurs comme un écho à ce que nombre d’entre nous ont pu vivre ce soir là, où il fut d’abord beaucoup question de répondre ou d’appeler au téléphone.

Le film ne se focalise que sur l’enquête policière, nécessairement éprouvante et hors norme, celle qui a suivi ce surgissement d’une guerre criminelle et absurde en plein Paris.

La tension est évidemment extrême et il s’agit de la restituer sans que cela semble factice ou artificiel. L’exercice est difficile à deux titres, au moins : le sujet est récent et encore très prégnant en nous, et les acteurs sont éventuellement trop connus (Dujardin, Kiberlain, Demoustier etc.), au risque que l’on se détache du rôle pour ne plus voir que l’acteur dans sa performance. C’est indéniablement casse gueule mais ça fonctionne, probablement aussi parce que les figures à l’écran sont justement incarnées.

Mais la difficulté majeure est probablement de nous raconter une histoire dont on connaît l’issue sans que jamais la tension ne retombe. On court, on se désespère, on tremble, vissés que nous sommes à cette caméra à l’épaule.

Cette course éperdue se terminera dans une violence totale (1576 balles tirées par le RAID dans l’immeuble où s’étaient planqués les terroristes survivants), trahissant l’urgence et la fébrilité des forces de police : mettre fin à cette horreur, à tout prix et le plus vite possible.

Le film, sans le révolutionner, se rattache efficacement à un genre dont l’exemple le plus emblématique pourrait être le « French Connection » de William Friedkin (1971) : une enquête policière, avec ce qu’il faut de stress et de fausses pistes, de travail de fourmi et de morceaux de bravoure (fusillades et course-poursuites, ce genre).

On trouve même ça et là quelques belles idées de mise en scène. Ainsi de l’utilisation des images prises par drones, caméra embarquées ou de vidéosurveillance, ces objets censés capturer le réel et servant ici à une reconstruction de ce dernier.

Point trop de tics ou de gadgets, point trop de lourdeurs, tout est fort bien maîtrisé par Cédric Jimenez qui réussit à faire d’un sujet délicat un film d’action à l’américaine, avec ce qu’il faut de proximité avec les êtres pour lui donner une indéniable sensibilité « qualité française ».

Sébastien Bourdon

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