« Louis-Ferdinand Céline, le voyage sans retour » une émission de Philippe Collin - podcast France Inter

Prévoyez un peu de temps, mais surtout planifiez le : une fois commencée, cette traversée radiophonique ne peut souffrir de ne pas être accomplie jusqu’à son terme.

En dix épisodes denses, de 55 minutes chacun, nous est raconté un parcours effarant, sans mesure, d’un homme probablement cinglé qui aura révolutionné la littérature tout en accompagnant de sa plume et de son énergie la pensée la plus ignoble de son temps.

Car Céline n’a pas fait qu’écrire des saloperies, il en aura inspirées, et même commises.

Son acharnement après guerre à s’innocenter (alors que sa fuite avant tout le monde trahissait une certaine lucidité), jusqu’à se noyer dans un délire de persécution (« Je trouve que tous les autres sont coupables, pas moi. Voilà comment je pense ») ne change rien à la matérialité des faits.

Certes, la tentative posthume de réhabiliter le poète maudit avant le pamphlétaire infâme à partir des années 80, à coups notamment de spectacles de Luchini (lui-même assez moisi finalement), a prospéré, c’est indéniable.

Mais cette remarquable émission maintient l’évidence de ce que si passionnante ait été son existence et riche son expérience, Céline était et est resté un antisémite et un raciste crasse (dans les années 50, l’invasion des asiatiques remplacera celle des juifs).

Il est également indiscutable que sa plume ait été proprement renversante, s’appropriant le langage des obscurs et des sans-grades pour en faire littérature de sueur et de sang. Hélas, a-t-on envie de dire, car comme l’a écrit Roger Grenier à la mort de Céline, « Il est toujours triste d’être obligé d’avoir honte d’un grand écrivain ».

L’émission, riche d’archives sonores, d’interventions d’historiens, chercheurs et journalistes, donne à penser une certaine histoire de France, à mettre en perspective, sans jamais cesser d’être captivante.

Sébastien Bourdon