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« Grand-peur et Misère du IIIe Reich » de Bertolt Brecht, mise en scène de Julie Duclos - Odéon, le 10 janvier 2025

mardi 14 janvier 2025, par Sébastien Bourdon

Malheur à qui n’entre pas dans la ronde

Nous sommes en 1933 et nous n’irons pas au-delà de 1938, dans une Allemagne qui n’est pas encore entrée en guerre, mais a porté Hitler à la chancellerie. Dans une succession de saynètes s’attardant sur toutes les strates de la population allemande, Bertolt Brecht décortique l’implacable imprégnation de la doctrine nazie sur la société civile.

Se trouvent ainsi progressivement faussées les règles de droit comme de bienséance, et même les liens du cœur, et tous dans un même élan finissent par être gouvernés par la méfiance et la peur. Car comme le dira un SA au début de la pièce : « le soupçon, c’est la certitude ».

Comme un mal qui s’étend, un poison qui se diffuse implacablement dans le corps social, même à son corps défendant, chacun finit par intégrer ce qui est exigé par le régime et tout un chacun de devenir le chien de garde de soi-même, comme des autres.

La pièce ne prend pas le parti de la fresque grandiloquente, avec démonstration appuyée de comment le mal vient au cœur de l’homme. Le dramaturge décortique finement comment tout se dérègle par le haut, comment ruisselle la pensée totalitaire.

La metteuse en scène a fait un choix resserré du texte, ne retenant que treize des vingt-quatre tableaux. Les comédiens enchaînent les rôles, devenant victime potentielle ou bourreau probable, c’est selon.

S’il est pris le parti de rester fidèle aux lieux et aux dates du texte, le choix d’un décor simple et mouvant selon les scènes, de costumes neutres (à l’exception de ceux des SA), permet de raconter hier, comme d’être dans un aujourd’hui potentiel. Cette idée de témoignage pour les temps futurs sous-tendait probablement la prose de Brecht et n’est donc point trahie ici, au contraire. A bon escient probablement, le texte n’a hélas pas vieilli.

Sébastien Bourdon

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