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« Les Passagers de la Nuit » de Mikhael Hers

samedi 14 mai 2022, par Sébastien Bourdon

Ennui Passager

L’élection de Mitterrand, la radio et les années 80 semblent devenir un sujet à creuser sur grand écran. Après le remarquable « Les Magnétiques » de Vincent Maël Cardona sur ce thème, voici le nettement moins réussi dernier film de Mikael Hers.

Elizabeth (Charlotte Gainsbourg) est une femme de cette époque, pas encore complètement libérée (mais comme on le chantait à l’époque, « c’est pas si facile »), survivante d’un cancer du sein et fraîchement quittée par son mari. Cette situation l’amène à chercher un emploi, qu’elle finit par trouver à France Inter. Elle vit à Beaugrenelle, preuve qu’à l’époque, on traversait la rue et on trouvait du boulot.

Le décor urbain de ce front de Seine est parfait pour restituer l’atmosphère de ces années. Le réalisateur prend toutefois soin d’en effacer le clinquant, la teinte sépia prend le dessus, comme si tout le film avait été capturé par une caméra super 8.

L’aspect esthétiquement évanescent ne se retrouve pas qu’à l’image, il est malheureusement aussi dans le propos : la vie c’est dur et chacun cherche son cocon.

L’épure du propos finit même par donner à l’œuvre une inconsistance palpable. La politique - qui ouvre le film et qui passionne la fille aînée de la protagoniste - reste essentiellement hors champ (quand bien même les images d’archive rappelleraient la joie et l’espoir immenses que généra l’arrivée de la gauche au pouvoir).

Les drames personnels sont tout juste nommés, mais on reste dans la distance : le cancer est une cicatrice, le mari parti n’existe pas, le chômage est un souci mais le vieux père aidera. Seule la solitude amoureuse est bien dessinée et ce d’autant que Charlotte Gainsbourg est exceptionnelle de justesse.

Les péripéties sont tellement escamotées que l’on finit par ne leur donner aucune importance. Tallulah (Noe Abita) qui apparaît et disparaît, censément fugueuse et héroïnomane, mais qui garde le teint frais. On se demande si son caractère mutique tient au personnage ou à ce qu’on n’a pas trouvé grand chose à lui faire dire.

Elisabeth la recueille, et on essaye de nous montrer à partir de là une famille recomposée, mais le petit oiseau ne fait pas nid, il préfère l’envol (sans que l’on ne comprenne ni vers quoi, ni pourquoi).

L’interprétation ne sauve pas les meubles, et on finit même par s’ennuyer, mais sans que ce soit désagréable, car c’est joli.

Sébastien Bourdon

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