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« La Ferme des Bertrand » de Gilles Perret (2024)

mardi 4 mars 2025, par Sébastien Bourdon

Mérite Agricole

En 1972, les caméras en noir et blanc de la télévision française s’étaient intéressées à trois frères exerçant en Haute-Savoie le noble métier d’agriculteur.

En 1997, documentariste venu en voisin, Gilles Perret avait fixé sur pellicule les mêmes, alors qu’ils s’apprêtaient à passer la main à leur neveu Patrick et à sa famille, après une existence solitaire de dur labeur.

Le jeune couple et ses trois jeunes enfants entendaient moderniser l’exploitation, simplement pour avoir une vie meilleure que leurs prédécesseurs (qui étaient déjà travaillés par la même problématique).

Été 2022, les caméras sont à nouveau plantées par le même documentariste pour prendre une fois de plus des nouvelles de la famille.

Du port systématique du bob Ricard, on est passé à la casquette, mais les enjeux restent les mêmes.

Deux des oncles sont morts et le dernier n’est pas très vaillant. Patrick est décédé prématurément, et sa veuve Hélène gère l’exploitation avec son fils et son gendre.

Elle aussi s’apprête à rendre son tablier, mais sans grande conviction, tant cette vie auprès des vaches et des champs ne s’abandonne pas si facilement, si éprouvante soit-elle.

Quant aux jeunes, ils sont encore plus attachés à moderniser que leurs prédécesseurs, mais gardent cette obsession d’une nature qui doit durer, pour ceux qui viendront ensuite.

C’est l’histoire d’un lieu, d’une terre au creux d’un paysage magnifique de moyenne montagne, et de sa transmission de génération en génération. Aussi rude que nourricière, impossible pour cette famille depuis plusieurs générations de s’imaginer ailleurs (seule la guerre d’Algérie aura ainsi fait voyager les trois « tontons »).

Cet immobilisme géographique de gens dont les mains seraient sans cesse plongées dans le cambouis, la luzerne et la bouse n’empêche nullement de constater leur totale lucidité sur leur vie ici : il ne s’est jamais agi de rincer la terre et les bêtes.

Leur propos est toujours clair, lucide et parfaitement exprimé. Qu’ils évoquent l’épuisement et la solitude, comme les enjeux économiques et écologiques, jamais la parole de ces paysans ne se défile.

Documentaire aussi sobre que pertinent, on quitte à regret ces gens. Il faudrait revenir les voir dans quelques années, prendre des nouvelles de leur monde, qui est aussi le nôtre.

Sébastien Bourdon

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