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« L’esprit Coubertin » de Jérémie Sein
vendredi 10 mai 2024, par
We are Spirits (in a material World)
Nous sommes dans un futur immédiat, les Jeux Olympiques de Paris, et c’est l’hécatombe chez les potentiels médaillés français. D’espoir d’or, d’argent et même de bronze, il subsiste à peine, aussi chez les officiels, comme les politiques et les journalistes, on oscille entre le désespoir et la panique.
C’est dans ce marasme qu’arrive celui dont on ignorait ou presque l’existence, Paul Bosquet (Benjamin Voisin), champion du monde de tir. Victime de sa personnalité - timide jusqu’à l’autisme - et vedette d’un sport dont tout le monde se fout ou presque, il fait un curieux sauveur de la France olympique.
Ce drôle de pistolet a un talent l’arme au poing aussi hors norme que l’est son incapacité à communiquer normalement avec les autres. Il n’était d’ailleurs présent aux olympiades que pour se surpasser, se moquant comme d’une guigne du reste, et le voilà plongé dans une mare où il va avoir du mal à nager.
Dès son arrivée au village olympique, en compagnie de sa fidèle coach bien allumée (Emmanuelle Bercot), l’organisation fait d’abord bien peu de cas de notre tireur et l’envoie partager sa chambre avec un nageur des Vanuatu (Rivaldo Pawawi). Ce dernier est plus préoccupé de tirer sur des pétards qui font rire et de sauter sur tout ce qui bouge, pour peu que cela soit féminin, que par un espoir - de toute façon nul - de médaille.
Alors que l’on pourrait craindre ici un dérapage un poil trop grivois - on rit certes un peu grassement - le ton reste léger. Il y a une élégance constante du plan, une douce étrangeté et un burlesque poétique porté par des acteurs exceptionnels, qui ramènent sans cesse le film vers des territoires sensibles (et politiques).
Cela donne une comédie à la saveur inattendue qui, si l’on peut en identifier les filiations, ne ressemble à aucune autre.
En ces temps de convictions absurdes et d’enthousiasme forcé, ce parti pris rafraîchissant de la déconnade rêveuse et éthérée est assez bienvenu.
Sébastien Bourdon