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« L’Amour et les Forêts » de Valérie Donzelli

mardi 30 mai 2023, par Sébastien Bourdon

Don’t you know that you’re toxic ?

Avant toute chose, prévenons les allergiques à Virginie Efira - dont nous ne sommes pas - elle est doublement présente dans ce film puisqu’y interprétant des jumelles. Ce n’est peut-être toutefois pas l’idée la plus pertinente de ce par ailleurs bon film, mais quand on aime, on ne compte pas.

Blanche (Virginie Efira) est une célibataire qui a sans doute un peu trop vécu pour y croire encore franchement. Un soir à Ver-sur-Mer (Calvados), sa jumelle, de nature plus festive, la traîne à une fête chez des amis.

Sur place, la jeune femme se sent un peu à côté de la joie des convives et se languit, seule sur le canapé, quand un garçon perdu de vue de longue date l’aborde et entreprend de la séduire ouvertement. Prédisposé à l’abordage des cœurs à prendre par son seul patronyme – Lamoureux – et son physique avantageux (Melvil Poupaud), il emporte le morceau et Blanche en devient très (trop ?) vite raide dingue.

L’amour est enfant de bohème c’est notoire, mais il est aussi une maladie et il s’avère que Grégoire en est atteint sous une forme grave. Sitôt la jeune femme emballée, il va progressivement couper son épouse de ses attaches géographiques (la Manche, perdue contre l’Est) et de son entourage pour mieux organiser un contrôle minutieux et obsessionnel de ses faits et gestes.

Le film (tiré du roman du même nom de Eric Reinhardt) se révèle dès l’ouverture être un long flash-back, construit autour de la narration que Blanche fait des évènements à une autre femme dont le rôle n’est pas tout de suite défini (Dominique Reymond). On comprend donc que Blanche a fini par fuir mais on ne sait malgré tout pas exactement comment tout cela va finir, nous obligeant à une inquiétude continue.

Il y avait un écueil majeur possible dans ce film, qui consistait à nous servir un long pensum sur la toxicité masculine, sujet éternel et indiscutable certes, mais quelque peu rebattu idéologiquement par les temps qui courent.

Heureusement, Valérie Donzelli n’est pas contre la fantaisie, même lorsqu’elle aborde des sujets graves (« La Guerre est Déclarée » - 2011 - en est plein, quand il s’agissait pourtant d’évoquer la maladie d’un enfant). On pouvait craindre qu’elle s’en départît dans la description de ce mâle toxique, mais là aussi, se glissent entre les sombres interstices des moments gracieux et lumineux. Ainsi d’une échappée rêveuse vers un autre homme caché dans la forêt (Bertrand Belin), et qui n’a rien du loup, bien au contraire.

Donzelli donne aussi respiration à son récit par la photographie, souvent éthérée comme dans un songe (ce qui est cohérent, puisque Blanche raconte a posteriori son calvaire).

Le visionnage du film n’en reste pas moins éprouvant grâce à un Melvil Poupaud particulièrement effrayant, additionnant tous les critères du maniaque narcissique qui n’aime que pour mieux étouffer.

Cela donne au final une œuvre qui doit plus à Hitchcock et Demy qu’à Mona Chollet, et s’agissant de cinéma, ce n’est peut-être pas plus mal.

Sébastien Bourdon

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