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« James Brown mettait des Bigoudis » texte et mise en scène de Yasmina Reza - Théâtre de la Colline

mardi 26 septembre 2023, par Sébastien Bourdon

To Be or not to Be

Yasmina Reza a notamment de passionnant d’être une auteure mondialement connue - on la joue partout - sans être réductible à des simplifications. Caustique et brillante, elle ne se laisse pas si facilement attraper et se déjoue ainsi d’une critique trop facile.

Reprenant des personnages de son roman « Heureux les Heureux », elle poursuit et développe ici leur trajectoire (et elle a raison, ils sont extrêmement sympathiques). Lionel (André Marcon) et Pascaline (Josiane Stoleru) ont un grand garçon dénommé Jacob (Micha Lescot) que sa passion dévorante pour Céline Dion a fait quelque peu vriller, justifiant son internement en maison de repos.

En effet, le jeune garçon se prend réellement pour la chanteuse, avec poses lascives et accent québécois, soucieux de préserver sa voix dans la perspective de sa prochaine tournée en Amérique du Sud.

En ces lieux champêtres et peuplés de doux dingues, il s’est fait un ami d’un jeune homme blanc convaincu d’être noir.

Évidemment, ces troubles du genre et de l’origine s’adressent directement à l’époque. Yasmina Reza - au texte comme à la mise en scène - prend garde de rester à distance, ne jouant pas forcément la provocation politique pour lui préférer le questionnement philosophique et la tristesse de ne plus savoir nommer ceux qu’on aime.

Et c’est ainsi que l’on s’attache irrésistiblement à ces deux petits vieux, parents errants dans l’époque, à l’image de cette institution dite « de repos » où ils se perdent invariablement et où les discussions lunaires avec la psychiatre en chef (Christèle Tual, exceptionnelle) les égarent plus encore.

Quand à nos deux jeunes, leur enfermement dans un autre, avec l’assentiment de la médecine comme des modernes, pourrait être sinistre, mais Yasmina Reza maîtrise parfaitement l’imbrication du tragique et du comique, donnant un allant irrésistible à l’ensemble.

Sa mise en scène, inventive et sensible, donne un espace de jeu extraordinaire à des comédiens tous exceptionnels (sans oublier un guitariste tromboniste tout ce qu’il y a de plus formidable : Joachim Latarjet).

Si l’ensemble semble parfois un peu confus, se plonger dans le texte ne fait jamais douter du talent intact de la dramaturge, justifiant encore et toujours son succès jamais démenti.

Sébastien Bourdon

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