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« Becoming Led Zeppelin » de Bernard Mac Mahon
mercredi 5 mars 2025, par
How the West was won
L’été du bac, il y a eu une promo sur des K7 au Leclerc de Moisselles. De mémoire, la moisson consista en deux Led Zeppelin (le II et le IV), « LA Woman » des Doors et le premier album de Rickie Lee Jones.
Radio-cassette sous le bras, la montagne était à moi, avec la bande-son adéquate.
Allongé dans l’herbe tendre au soir couchant, les accords de « Whole Lotta Love » n’étaient pas absorbés par le grondement de la rivière, et la musique semblait une évidence vitale. En 1989, on arrivait bien après la bataille, Led Zeppelin n’existait plus depuis un moment, mais la vie pouvait commencer.
Le propos de ce remarquable documentaire n’est pas de faire un balayage exhaustif de la carrière aussi fulgurante que météoritique des anglais, mais de documenter comment ça a commencé.
Les aïeux de Plant, Jones, Bonham et Page avaient traversé deux guerres, et c’est dans une Angleterre qui pansait ses plaies qu’ont commencé à se passionner pour la musique ces jeunes gens qui allaient bientôt conquérir le monde.
Lorsque, à la fin des années 60, se forme le groupe, si frais soient ses membres, ils n’en sont pas moins chevronnés, et particulièrement John Paul Jones (basse, clavier) et Jimmy Page (guitare). En effet, voilà des années que ces deux là écument les studios londoniens, apposant leur patte et leur extrême habileté technique sur les disques d’à peu près tout le monde.
Lassés de jouer des quantités de notes pour autrui, ils se lancent dans la formation de ce qui fera leur gloire, Led Zeppelin, enrôlant au passage un chanteur à la tessiture exceptionnelle (Robert Plant) et un batteur qui révolutionna l’instrument (John Bonham).
Si l’on reste dans une relative urgence rock n’roll, le genre musical rentre avec eux dans sa maturité : on joue fort, précis et complexe, en intégrant les leçons des pionniers, mais aussi la rigueur complexe du classique, voire de l’avant-garde, en conservant la faculté d’improvisation du blues et du jazz. On ne fait pas des chansons : on fait des albums.
Pour illustrer ce fascinant parcours dans une époque qui ne l’était pas moins, on recueille le témoignage des trois survivants, et miracle a également été exhumée une archive inédite : une interview perdue et oubliée de feu John Bonham (décédé en 1980), qui permet d’entendre sa voix trop rare et de découvrir sa vision de cette époque.
Le film est également gavé d’archives en tous genres et laisse, c’est bien le moins que l’on puisse faire ici, une large place à la musique.
Le film s’achève à la sortie de « Led Zeppelin II » (octobre 1969), aux portes du pouvoir pour un groupe qui conservera presque jusqu’à son dernier souffle une puissance créative titanesque et que seule la mort - celle du batteur - séparera définitivement.
Il y avait dans la salle, au premier rang, un vieux monsieur en chemise indienne et queue de cheval, un peu éméché, qui ne cessa tout le long du film de manifester bruyamment sa joie comme s’il était dans son canapé. Cette musique fit donc aussi quelques victimes, mais du genre joyeuses.
En rentrant, on avait envie de se mettre un disque, preuve de la qualité de la soirée.
Sébastien Bourdon