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« Chanson Douce » de Leïla Slimani, adaptation de Pauline Bayle – Espace 1789 le 14 mai 2019

vendredi 17 mai 2019, par Sébastien Bourdon

Nursery Cryme

Sur le papier comme sur la scène, la pièce ne pouvait qu’éveiller la curiosité. Succès critique (Goncourt 2016) et public, le livre de Leïla Slimani ici adapté a clairement rencontré son public, mais ne l’ayant point lu, c’est vierge de tout préjugé que je suis entré dans la salle.

Les lieux étaient pleins et réservés de longue date, l’attente était perceptible et on imagine que de nombreux lecteurs du roman attendaient avec gourmandise l’épreuve des planches.

Comment d’une « perle » si difficile à trouver, Mary Poppins devient finalement encombrante, quand pour sa part elle jalouse progressivement ceux qu’elle emploie jusqu’à dévorer leurs enfants : l’histoire est indéniablement atroce, dont acte, et inspirée d’un fait divers new-yorkais.

Si l’on résume, le texte est bien tourné, qu’ils jouent ou commentent l’action, les comédiens l’ont bien en bouche (Florence Viala, Sébastien Pouderoux, Anna Cervinka). Les situations, parfois familières pour certains (plutôt ceux appartenant à la upper middle class), sont fort bien dépeintes et l’histoire de cette nounou devenue meurtrière résonne en nous de sa crédibilité.

Et pourtant, nonobstant une mise en scène au cordeau, des interprètes (de la Comédie Française !) toujours extrêmement justes, quelque chose rend l’ensemble assez peu intéressant car trop systématiquement prévisible.

Tout nous est ainsi sans cesse expliqué, abondamment surligné, quand en réalité la qualité de l’ensemble ne le nécessiterait pas.

Ainsi pourquoi faire parler la nounou dans une sorte de voix off quand son silence face à la beauté grecque et au bonheur de ses employeurs produit évidemment sur elle un effet miroir écrasant ?

Ce phénomène de didactisme vient peut-être d’une trop grande fidélité au livre, comme si l’adaptation refusait de s’en détacher. Seuls trois acteurs sont présents sur scène (la nounou et les parents, ces derniers interprétant aussi les deux enfants). Mais ils jaillissent également pour de courtes interventions de personnages secondaires surabondants. Ces brèves scènes n’apportent grand chose, car rien n’y est fouillé (la nounou musulmane sans papiers, la fille de la nounou etc.).

Pauline Bayle, pourtant elle-même comédienne, donne l’impression d’avoir adapté le roman pour le théâtre avec la conviction de devoir nous expliquer beaucoup, oubliant que sur scène tout est de facto plus visible (et que le temps du théâtre est plus court que celui du roman).

Difficile donc de se défaire de cette impression de signifiant à l’excès quand aucune marge ne semble laissée au spectateur, la seule liberté qui lui reste étant d’apprécier - ou pas - la pièce.

Sébastien Bourdon

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