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Blanc, couleur de deuil
samedi 5 octobre 2024, par
Faut-il ajouter au concert - mérité - de louanges après la disparition de Michel Blanc ? Peut-être, mais évitons, au moins pour commencer, de parler de Jean-Claude Dusse.
Commençons plutôt par la fin, ou du moins bien plus tard. Gilles, directeur de cabinet du Ministre des Transports, se prépare des œufs dans son appartement aussi élégant qu’épuré. En fond sonore, à un niveau élevé, un discours de Malraux.
Tout au long de ce film - « L’exercice de l’Etat » Pierre Schoeller (2011) - Michel Blanc, dans une interprétation faite de rigueur et retenue, habite l’image. Plutôt que le frustré de service, incarné jusqu’à son propre écœurement au début de sa carrière, retenons d’abord cette interprétation exemplaire d’un homme intègre et discret, installé au cœur de l’Etat.
C’est long une carrière d’acteur, surtout quand elle débute si fortement par une incarnation, au risque d’enfermer l’acteur dans un type de personnage. Michel Blanc a en quelque sorte souffert du même phénomène que Delon : comme lui, pour acquérir une crédibilité, il allait devoir ne pas compter que sur son physique.
Le mot qui a fait surgir le comédien dans nos imaginaires de spectateurs, comme dans notre quotidien, est celui de « malentendu » (celui avec lequel « ça pourrait marcher » justement). Finalement, il n’y a pas eu de malentendu, patiemment et méthodiquement, Michel Blanc a montré l’acteur qu’il pouvait être, sans être enfermé dans ce qui l’a révélé.
Sinon et évidemment, faisant partie d’une génération qui a vu « Les Bronzés font du Ski » (Patrice Leconte - 1979) au cinéma, l’acteur et sa troupe toute entière ont incarné un ton et un temps, aujourd’hui enfui. Alors la mort subite, un peu tôt quand même, vient mettre un clou supplémentaire dans le cercueil.
Sébastien Bourdon