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« A Plein Temps » d’Eric Gravel

samedi 2 avril 2022, par Sébastien Bourdon

Elle court, elle court, la banlieue

Julie (Laure Calamy) ne cesse de foncer d’un point à un autre, de sa banlieue lointaine où elle vit seule avec ses deux enfants, au palace parisien où elle encadre une équipe de femmes de chambre. Le cinéma se fait ici reflet de l’époque, et il semble qu’elle soit rude aux femmes (comme aux hommes, mais ils ne sont qu’ombres esquivées ici). Julie est fatiguée mais n’a en quelque sorte pas le droit de l’être.

C’est à peine plus de 24 heures dans la vie d’une femme qui nous sont contées là, et à un moment particulier puisque s’additionnent problèmes et espérances de manière particulièrement ramassée. En effet, Paris est en grève générale et Julie ambitionne de revenir à son vrai métier, celui d’analyste (on imagine évidemment que c’est à l’occasion du mariage puis du divorce que serait produit ce déclassement socioprofessionnel). Pour cela, elle doit se défier des transports pour ne pas manquer à sa tâche actuelle, à ses enfants chez la nounou, et à ses entretiens d’embauche, au moment où la circulation est devenue impossible.

Transformer un quotidien compliqué en film palpitant comme un polar, c’est probablement ce qui animait le réalisateur, et c’est tout à fait réussi : arriver à choper un RER pour rentrer en grande couronne devient ici aussi haletant que la course-poursuite de « French Connection » (William Friedkin - 1971).

La maîtrise dont fait ici preuve le réalisateur franco-canadien Éric Gravel est indiscutable : le spectateur n’a pas plus de répit que la protagoniste, comme la caméra, on la suit dans le chaos avec la menace permanente du naufrage. Visuellement, c’est superbe, et la mise en scène est serrée comme l’étau qu’elle semble avoir autour du cou.

Le scénario est toutefois peut-être plus critiquable, la crédibilité de toutes ces péripéties rassemblées en un temps très court pourrait être questionnée. Mais c’est l’art du cinéma que de faire croire au réel et au plausible et il fallait peut-être en faire un peu trop pour rendre plus convaincant l’aspect palpitant de l’ensemble.

Si tout se tient à l’image c’est probablement aussi et grâce à Laure Calamy qui une fois de plus fait montre de l’immensité de son talent. En moins princesse que feu Romy Schneider, elle a cette capacité à composer des personnages de femmes crédibles et attachants, ancrés dans un immédiat qui nous parle, nous touche et nous émeut.

Sébastien Bourdon

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