Russian Circles + REZN - Le Trianon, le 5 novembre 2024

REZN, quatuor de Chicago, arrive devant une fosse un chouïa dégarnie, mais pas d’inquiétude, ça se remplira. C’est heureux car se priver de ce magma sonore lancinant serait péché.

Le groupe a la musique trempée dans un chaudron 70’s, et ce ne sont pas les interventions particulièrement bien senties du saxophoniste qui nous écarteront de cette heureuse sensation (l’instrument à vent accompagné de cette énorme basse évoquerait aussi les divins, hélas disparus, Morphine).

Ça sonne donc d’époque, toutefois cette manière d’assembler les sonorités donne une belle contemporanéité à l’ensemble. On est dans l’écume de nos jours : lourd, lent, dépressif bien comme il faut.

Visiblement touché de l’accueil, le groupe reçoit en partant l’ovation qu’il méritait.

À peine le temps de finir sa bière - le plus long étant d’en acheter une, les bars sont bondés - qu’arrive le trio instrumental tête d’affiche du soir, les petits gars de l’Ilinois, Russian Circles.

Neurasthéniques comme il faut (mais souriants), sans s’embarrasser de bavardages inutiles, ils nous embarquent à bord d’un vaisseau spatial perdu dans une tempête cosmique.

On se pose parfois, exsangues, sur des astres noirs, le temps d’une respiration, avant de repartir dans le vortex, emportés par un irrésistible courant.

Musique aussi profonde qu’intense qui, au creux de la foule et de la houle, vous ramène à l’intérieur de vous-même, jusqu’à la joie d’être au fond de soi. L’écoute recueillie de Russian Circles évoque ce tableau du peintre belge Khnopff : "I lock my door upon myself" (1891). Et on s’y sent étrangement bien.

Sébastien Bourdon