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Peter Gabriel « i/o »

mercredi 28 février 2024, par Sébastien Bourdon

When l’m 74

Peter Gabriel vient d’avoir 74 ans et l’écoute de son dernier album - « i/o », sorti en décembre dernier - pourrait nous convaincre qu’il est heureux. En tout cas, ayant mis vingt-et-une années pour l’achever, l’artiste n’est clairement pas sous pression.

Mais comment le serait-il ? On peut lui reprocher beaucoup de choses à l’archange, mais certainement pas d’avoir cédé aux sirènes de la notoriété pour ensuite toujours et sans cesse les quérir.

En 1975, au moment où Genesis commence à marcher, il se barre pour mener une carrière où, tout du moins au début, il s’est distingué par des variations - certes sur le même thème - de style radicales et des expérimentations sonores indiscutables (les quatre premiers albums éponymes).

Puis, sans forcément être putassier, le succès est venu, massif et interplanétaire, avec « So » (1986). À partir de là se sont dangereusement étirées les latences entre les disques, et chaque nouvelle sortie trahissait un travail sur le métier sans cesse remis, jusqu’à perdre toute sensation de spontanéité. Des disques parfaits, mais où, si l’on ôtait la merveilleuse voix de Peter Gabriel, pouvait suinter un relatif ennui.

Il faut dire qu’ils sont bien jolis les studios Real World et qu’avec un bureau pareil, on renoncerait au télétravail sans jamais cesser de travailler. Et alors si en plus la pression financière est inexistante (ceci dit, il est arrivé à Peter Gabriel de littéralement se ruiner, comme avec le festival Womad en 1982)…

Ses concerts sont devenus du même acabit, shows luxueux aux références multiculturelles intellectualisantes et esthétisantes, où toute urgence rock n’roll est mise de côté. Il est loin, mais finalement peut-être si proche, le jeune anglais débarquant sur scène en robe rouge et masque de renard sous les yeux sidérés de ses comparses de Genesis.

S’agissant d’un artiste nous accompagnant depuis près de quatre décennies, il allait de soi qu’on écouterait son nouveau disque, quasi religieusement.

Toujours aussi maniaque, l’objet est sorti en nombreuses formes et éditions, avec notamment des mixages différents. Évidemment, si on a un peu de goût, on se plonge dans le mix « Dark-Side  », parce que le côté sombre a plus d’attraits. Si on est geek, on a tout le matériel hi-fi ad hoc et une pièce consacrée à cela dans sa maison de campagne pour écouter le « In-Side », la version Blu-ray, qui évidemment est au-dessus de tout le reste (mais on ne pourra pas ici en témoigner).

Et au final qu’obtient-on ? Un disque riche mais qui ne révolutionnera pas la musique ni la carrière de l’artiste, et qui semble parfois même un peu daté (les cuivres !). Toutefois, après quelques écoutes, il se loge au creux de l’âme, pour peu qu’on ait un tant soit peu à un moment dans sa vie aimé Peter Gabriel.

Parce qu’il y a d’abord la voix, intacte et fragile, et puis ce morceau d’essence divine qu’est « Four Kinds of Horses », démontrant, entre autres petits miracles disséminés dans l’album, que l’artiste reste pertinent : des balbutiements de Genesis à ce jour, et pour des lendemains qu’on espère aussi beaux que nombreux.

Sébastien Bourdon

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