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Parakalo

mercredi 11 août 2010, par Sébastien Bourdon

Enfant, je suis allé en Grèce avec mes parents, nous avions loué un voilier. J’en conserve des souvenirs toujours vivaces, de toute nature. Ainsi, la fille d’amis de mes parents, un peu plus âgée que moi, alors que je me tenais à l’entrée du bateau était arrivée derrière moi et m’avait subrepticement caressé le cou, déclenchant chez moi un trouble extrême. Je me souviens également d’un matin où je m’étais réveillé avant tout le monde et était monté sur le pont retrouver mon père qui tenait la barre. Un ciel rose s’élevait sur une mer d’huile et tout à coup des dauphins ont sauté hors de l’eau. Ça fait un peu carte postale comme souvenir, mais j’en conserve une image d’une beauté stupéfiante et profondément apaisante. Enfin, je n’ai jamais oublié un aurige en bronze à Delphes dont le regard m’avait semblé étrangement vivant.

Aujourd’hui, ce qui reste merveilleux en Grèce, et dans les Cyclades en l’occurrence, c’est la possibilité de pouvoir s’échapper de plages parfois envahies (quoique, on trouve quand même de jolies étendues de sable calmes et isolées), pour se rendre dans les terres et découvrir des sites magiques (le temple de Déméter à Naxos, l’ancienne Minoa à Amorgos…). Et tout à coup, on est comme des enfants parcourant l’Atlantide, l’imagination enflammée par la trace de mondes disparus.

Les Cyclades, ce sont évidemment des paysages sublimes, comme seules les îles en offrent, frêles esquifs de terre et de pierre au milieu de l’océan. A Amorgos, je retournais sans cesse sur notre terrasse, dans les hauteurs face à la mer, comme pour vérifier qu’une vue aussi belle puisse vraiment exister. Toujours présente et toujours changeante au gré des lumières de la continuité du jour.

C’est également le pays des couchers de soleil, de Paros à Santorin face à la Caldeira, en passant par la porte d’Apollon à Naxos, nous avons vu tant de fois le soleil mourir dans la mer.

Là-bas, le soleil se mêle au vent (le Meltem). Ces éléments conjugués contribuent à une forme d’érotisation de l’atmosphère. Eole, de son souffle, plaque les vêtements légers des femmes et soulève leurs jupes, et je n’y fus pas insensible.

Certes, l’été avançant au fur et à mesure de notre périple, nous avons vu la foule touristique arriver, et une humanité repue se ruer aux portes des vacances en perdant toute forme de distinction et d’élégance (surtout à Santorin). Force est notamment de constater que Paris Hilton a fait beaucoup de mal à la gent féminine. Il me fut impossible de dénombrer le nombre de grues, plus ou moins cendrées, portant lunettes de mouche et chapeaux de cowboy en paille. Comme alternative, il y a les Ray-Ban. En gros, l’alternative optique solaire féminine, dès que l’on descend sous la Loire, c’est Paris Hilton ou Nicolas Sarkozy…

Le tour de taille n’étant pas toujours en adéquation avec le look, le port du short en jean (un « must have 2010 » comme on dit dans Elle) donnait des résultats amusants. Portés très près du corps, il obligeait les jeunes grecques arrivées à la plage à un lent et parcimonieux déshabillage afin d’arriver à l’ôter sans emporter le maillot de bain en même temps. On se serait cru à Rio.

Pour les garçons, le concours du tee-shirt laid et stupide est sans cesse relancé. De la marque de sport affichée en gros (mais pourquoi vouloir se promener avec Nike écrit en gros sur soi ?) au slogan imbécile (le pire, « Party Animal », qui se porte avec beaucoup de gel dans les cheveux orientant la masse capillaire selon le sens du vent). A Paros, j’ai retrouvé le moral lorsque j’ai croisé à l’hôtel un type avec un tee-shirt Joy Division, comme une apparition souveraine et inattendue (Unknown Pleasures). De même dans les rue de Chora à Amorgos ai-je félicité le porteur d’un tee-shirt Mastodon qui en sembla étonné et ravi.

Le tee-shirt est un langage en soi et il peut d’ailleurs s’avérer utile à l’étranger. Ainsi, le tenancier de notre pension à Amorgos était pour le moins distant et bougon jusqu’au jour où j’ai pris mon petit-déjeuner avec un tee-shirt Rock n’Roll Over (Kiss). Il est venu s’asseoir avec nous et nous sommes devenus les meilleurs amis du monde (je lui ai même prêté des disques, c’est dire).

Quelques plaisirs adjacents et simultanés qui pourront peut-être servir à d’autres :

Play-list :

Danko Jones Below The Belt (2010)

Twisted Sister Stay Hungry (1984) : après le Hellfest, le titre « We’re not gonna take it » fit un parfait hymne des vacances

Stone Temple Pilots, le nouveau (2010 donc).

Divine Comedy Bang Goes The Knighthood (2010)

Mondo Cane (2010)

Deftones Diamond Eye (2010)

Paul Mc Cartney Back to the Egg (1979) : chef d’œuvre jusqu’alors inconnu de mes services. A noter la participation sur deux titres de la rythmique de Led Zeppelin. Avec un peu de temps, j’aurais sûrement pu vous faire une thèse sur ce mélange hautement explosif (« De la capacité mélodique de Macca plongée dans la forge zeppelinienne », ce genre).

UFO Lights Out (1977) : chef d’œuvre de heavy rock 70’s.

Read-list :

Russel Banks Histoire de réussir : bien, mais ce sont des nouvelles. Et c’est un peu court les nouvelles.

Shalom Auslander La Lamentation du Prépuce : irrespectueux, hilarant et cruel.

Harper Lee To Kill A Mockingbird : lu dans le texte je vous prie. Un classique qui n’usurpe pas sa réputation, d’autant que la narration par une petite fille est un exercice périlleux.

José Carlos Somoza La Caverne des Idées : ayant lu tout ce que j’avais emporté, j’ai piqué ça à ma chère et tendre. Polar philosophique dans la Grèce antique, c’était indiscutablement impeccablement choisi géographiquement parlant.

Sébastien

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