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Lord of this world

OZZY OSBOURNE (plus Danko Jones et Korn) – POPB le 20 septembre 2010

mardi 21 septembre 2010, par Sébastien Bourdon

Usé physiquement et psychiquement par une longue journée de badass lawyer, je sors du métro à Bercy en comptant retrouver mes camarades pour aller écouter la deuxième première partie, Korn, car pour Danko Jones, c’était rapé, trop tard.

Mais d’un restaurant, je suis interpellé par un couple d’amis, attablés confortablement pour dîner. Je ne sais plus si c’est André Bazin (inventeur de la cinéphilie moderne et mentor de François Truffaut) ou son épouse, Janine, qui a dit que « l’on reconnaît le cinéphile à ce qu’entre un bon film et un bon repas, il choisit le bon repas ». Cela doit valoir pour la mélomanie, et j’ajouterai même qu’au-delà du repas lui-même, la compagnie qui va avec a en l’espèce son importance. Je les rejoins, rate Korn et passe un très bon moment, mais à table, paisiblement.

Mais, les profiteroles achevées, il est temps de rejoindre la salle, juste à temps, car ça commence, le Prince des Ténèbres monte sur la scène d’un Bercy qui, s’il n’est pas vraiment complet, est enthousiaste.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, je n’avais jamais vu le vétéran Osbourne sur scène. Las, ce vieil anglais est perfidement avare de visites en France. Créateur au sein de Black Sabbath du heavy metal - en passant la musique des Beatles à la moulinette de Cream - il a clairement été à l’origine de la plupart des musiques que j’ai adorées depuis 30 ans. Je suis peu sa carrière solo (onze disques depuis 1980, sans compter les albums live), préférant de loin sa carrière au sein du Sabbath noir. On y trouve tout de même quelques pépites comme « Diary of a Madman » ou « No More Tears » et d’imparables hymnes du genre, « Mr Crowley » ou « Bark at the Moon ».

Si je me réjouissais donc de voir le grand-père de notre genre musical chéri, je m’inquiétais toutefois de sa forme et me préparait à sortir de la salle un peu désappointé, mais en me disant que cela ne manquerait plus à mon palmarès, j’aurais vu Ozzy en vrai. Les vidéos de ses récentes prestations pouvaient en effet parfois faire peur, le garçon n’étant plus très flambant, notamment sur le plan vocal. A ma grande surprise, Ozzy du haut de ses 61 ans ne fut pas décevant et a joué même près de deux heures !

Le garçon fut même à la hauteur du mythe. Il a bien chanté et peut encore bouger. Certes, sa façon de se mouvoir est étrange, mais elle l’était déjà lorsqu’il avait vingt ans à Birmingham. Il nous a dit qu’on était fous et qu’il nous aimait, qu’il était fou lui-même, qu’il voulait voir nos mains et il nous a arrosés régulièrement avec un canon à mousse et des seaux d’eau. Bref, Ozzy tel que l’on se l’imagine.

Le problème résidait en fait dans les accompagnateurs : un conglomérat de baltringues dans lequel il était difficile de déterminer à qui donner la palme du ridicule. Le batteur sans doute, qui s’obstinait à lever le bras gauche très haut entre chaque coup porté sur la caisse claire. L’effet visuel était grotesque et en plus, cela le privait de toute possibilité de jouer avec finesse et doigté, capacité dont il était, selon toute vraisemblance, dépourvu. Je recommande aux amateurs la vision du concert donné par un Black Sabbath reformé pour l’anniversaire de la Reine d’Angleterre (toute tentative de comparaison d’un tel évènement avec la même chose France est vaine). Derrière les fûts officiait un certain… Phil Collins, batteur de la même génération qui, en toute simplicité donne le groove nécessaire à cette musique.

Le guitariste, Gus G, grec de son état, a soigneusement agité ses beaux cheveux bouclés, en jouant devant un ventilateur qui les faisait gracieusement s’élever dans les airs. Ce cliché métal recyclé sans humour était des plus pathétiques. Je me souviens de Monster Magnet à l’Elysée-Montmartre usant du même effet, mais avec tout le second degré nécessaire.

Le bassiste bénéficiait du même équipement pour faire ressortir l’exemplarité de son système capillaire, accentuant l’effet piteux de cette mise en scène.

Ce problème visuel était rehaussé par l’absence totale de charisme et de musicalité de ces musiciens. Quand on se souvient des brillants instrumentistes qu’a pu employer Ozzy par le passé, c’est assez douloureux (Mike Bordin, Robert Trujillo…). Gus G n’avait ainsi ni le génie du défunt Randy Rhoads, ni l’agressivité du teigneux Zakk Wylde.

Nous avons donc été injustement privés de la magie qu’aurait du générer cet évènement, nonobstant l’interprétation de nombreux classiques de Sabbath comme « War Pigs », « Iron Man » ou « Fairies wear Boots ». Tout cela souffrait cruellement de la comparaison du concert donné par Dio et les membres de Sabbath au Hellfest l’an passé.

C’est ainsi que j’avais fini, durant un « Paranoïd » joué en pilotage automatique, par me désintéresser du concert, perdu dans mes pensées et la contemplation admirative du déhanchement fessier d’une proche spectatrice particulièrement sexy (voire sexuelle) quand, tout à coup, à la sortie du gentiment pénible « Mama, I’m coming home », je reconnais le riff exceptionnel de « Into the void » (Black Sabbath - Master of Reality, 1971). Alain et moi bondissons comme des cabris et rejoignons les premiers rangs pour apprécier avec la masse la rare offrande. J’en oublie les musiciens grotesques pour me plonger dans ce riff sabbathique par essence.

Ce titre à lui seul a sauvé le concert. Je vote pour une reformation de Black Sabbath dans les vignes de Clisson en 2011.

Sébastien


J’ai toujours le sublime riff d’Into the void en tête… J’en reprends pour 20 ans de sabbath.

Il était également très plaisant de se plonger dans le « Fairies wear boots » où Ozzy en 1970 se moquait des skinheads qui les coursaient dans les rues de Birmingham en raison de leur cheveux trop longs.

Quelques conseils :

Sur into the void :

Si la version de Sabbath est incontournable, ne pas hésiter à jeter une oreille sur la très bonne cover de Monster Magnet, dans le genre « extended version » psyché.

Sur Sabbath :

Regarder le DVD de la série Classic Album sur le Paranoid de BS (1970). Voir l’ingé son de l’époque, isoler sur la console telle ou telle piste d’un morceau, nous fait comprendre la richesse musicale du groupe. Du jeu si particulier de Tony Iommi à celui s’inspirant du jazz du batteur. Souvent virtuose, jamais démonstratif.

Et une préoccupation constante pour le Sab four, faire sienne la règle du Fab four de Liverpool, ne jamais enregistrer 2 fois le même morceau.

Autre anecdote intéressante, les textes de Sabbath dénonçant la guerre du Vietnam ne sont pas une simple récupération de rocker opportuniste. B.S a joué à de nombreuses reprises dans une base américaine pour les vétérans et blessés du Vietnam transitaient avant d’être démobilisés. L’hymne anti-militariste « War Pigs » ne parle donc que de çà et de ses cochons de Washington qui s’engraissent pendant que …

Alain

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