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Glaciation de l’horreur

mardi 18 février 2025, par Sébastien Bourdon

Avec toute cette pluie, on avait oublié le bruit de la neige. Ce son de nos pas étouffé, ce vague grincement, cette vibration qui meurt dans la ouate blanche et froide.

Il y a là quelque chose d’une infinie douceur, qu’un soleil de plomb sur une plage en été ne produit pas.

On a dans une vie d’occidental vaguement mobile visité des tas de ruines et, enfant, nos jeux de plage normands étaient imprégnés des ruines de guerre, le bunker au bord de l’eau semblant aussi naturel que les grandes et immuables marées de la Manche.

Mais de camp de concentration, jamais. Pas de vacances en Pologne, peu en Allemagne, ni de voyages scolaires pour y pallier.

Il y en a pourtant un sur le territoire national, au lieu-dit Natzweiler-Struthof, et après avoir été si souvent passé à côté, on a finalement pris le temps.

Bâtiments provisoires de l’horreur éternelle, aujourd’hui figés. L’économie mise ici dans ce qui devait servir à ses semblables dit aussi des choses qu’on leur a faites subir, la réduction ultime de leur humanité.

Préserver tout cela semble artificiel, peut-être. N’empêche, tout cela parle, hurle à nos oreilles.

Est-ce utile que de maintenir tout cela pour les bonnes volontés qui voudront bien s’y rendre ? Il en a pensé quoi le bébé nourri par sa mère à la becquée pendant la projection du film ? La jeune fille dont la sœur aînée n’a pas résisté à la tentation de la boule de neige, même en des lieux si glacés ? Le « devoir de mémoire » fait-il sens ?

À la fermeture du site, la brume nocturne s’épaississait sur la neige froide, la nuit et le brouillard occupaient tout l’espace silencieux.

Sébastien Bourdon

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