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« La Chute de l’Empire Américain » de Denys Arcand

lundi 11 mars 2019, par Sébastien Bourdon

Money, it’s a crime

C’est l’histoire d’un type bien, Pierre-Paul Daoust (Alexandre Landry) qui, sans y réfléchir plus que cela, subtilise le fruit d’un hold-up, idée saugrenue qui va le plonger évidemment dans une succession de péripéties haletantes.

Pour mieux cerner le propos du film, rappelons que le réalisateur québécois Denys Arcand évoquait en 1986 le « déclin » du même empire (américain) et qu’aujourd’hui il parle de carrément de sa « chute ». Mais il décide d’en rire, et de nous mettre dans cet exact état souriant en suivant les aventures de cette équipe de malfaiteurs, chevronnés ou débutants, selon les cas.

Tout commence par une rupture amoureuse, celle de notre héros précité - docteur en philosophie tellement convaincu de la médiocrité du système qu’il a choisi d’être livreur - avec une employée de banque mère et divorcée, forcément plus pragmatique mais bien malheureuse.

La scène d’ouverture donne donc le ton du film, philosophons sur le désastre, mais en faisant un pas de côté. C’est évidemment noble que de maîtriser Platon et Althusser, mais soyons réaliste, ça ne sert à rien en ce bas monde, et surtout pas à « réussir ».

La seule chose qui donc marche au sein de cet empire en décrépitude, c’est l’argent, à condition d’en avoir, et en voilà justement qui tombe du ciel. Son presque involontaire larcin effectué, faisant philosophiquement fi de la morale, notre binoclard livreur recrute ensuite maladroitement une équipe de pieds nickelés et se lance dans le blanchiment d’argent sale.

En partant de cette intrigue somme toute assez téléphonée, le réalisateur s’attache aux protagonistes - qu’il filme admirablement - pour esquisser un portrait certes peu flatteur de la société contemporaine, mais avec bienveillance pour ses personnages et un esprit caustique salvateur pour le reste (cela se passe en Amérique, au Québec, mais on pourrait aussi bien être chez nous, et pas seulement parce qu’on y parle français).

Sous des dehors drolatiques, l’auteur rappelle malgré tout la virulence du propos en n’oubliant jamais de montrer en arrière-champ les vrais déclassés, clochards le plus souvent aux origines indiennes et véritables damnés de la Terre en cette Amérique du Nord depuis longtemps conquise.

Mais finalement, malgré la décadence morale et le cynisme, tout reste possible dans ce monde finissant, même l’amour improbable et inattendu.

Sébastien Bourdon

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