Accueil > Littérature > When I Was 15

When I Was 15

samedi 22 juillet 2023, par Sébastien Bourdon

Été 1986, j’ai quinze ans. Je partage mon temps entre la mer et la montagne, des vacances bourgeoises bohèmes, mode de vie que mes parents ont quasiment inventé.

Il me semble que jamais il n’y a eu autant de filles partout. Ça brûle, mais je persiste à m’enferrer dans un romantisme qui me sera fatal, c’est pas un truc pour les pieds tendres les filles.

Dans la maison familiale normande, avec les cousins, on est tous ensemble dans le dortoir. Au fond de la pièce une bibliothèque fait également placard, fonction invisible à celui qui l’ignore. Ses étagères sont entièrement remplies de romans policiers, de « Série Noire », passion de mes oncles dans leurs jeunes années.

Hormis les Agatha Christie, ces bouquins jaunes ou noirs m’inspirent peu, sauf les photos aguicheuses de couvertures, plus souvent argument de vente qu’indication honnête sur un contenu sulfureux.

Il y a un unique « SAS » et le feuilletant de manière compulsive à la recherche de quelques lignes un peu chaudes, je tombe sur cette phrase, peut-être ici vaguement déformée, mais jamais oubliée : « il pénétra d’une seule poussée dans le fourreau brûlant ». Il n’est pas aisé pour le freluquet soupirant de créer la moindre connexion cérébrale entre ce propos de toute puissance masculine outrée et le rouge qui lui monte au front à la seule vue des robes de popeline de coton qui virevoltent dans les rues assommées de chaleur.

Une autre phrase décrivait ce continent inconnu, mais d’un auteur plus respectable, Boris Vian, alias Vernon Sullivan, dans « J’irai Cracher sur vos Tombes » : «  Sa toison était fine et serrée comme de l’astrakan » (le concept de toison était aussi nébuleux que l’astrakan, et pourtant ces lignes donnaient sacrément chaud).

À quel moment on arrive à une telle assurance avec une femme ? La réponse est évidemment jamais, et en tout cas il fallait nuancer le concept.

C’est qu’il faut lire plus, Gérard de Villiers et Régine Desforges ne nous apprendront rien, si ce n’est à à peine soulager un désir sans fin, sans faire rien d’autre que de nous y confronter vainement. King, Flaubert, Maupassant, Camus, Buzzati, Roth, Ernaux et d’autres nous éclaireront. On peinera quand même à comprendre nos existences absurdes et désirantes, mais sans livres, ce serait vraiment trop douloureux.

Sébastien Bourdon

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.