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« Basic Instinct » de Paul Verhoeven (1992)

jeudi 22 juillet 2021, par Sébastien Bourdon

Le Coup du Siècle

Aussi surprenant que cela puisse être, près de trente ans après sa sortie, ce n’est qu’aujourd’hui que l’auteur de ces lignes a découvert enfin ce désormais classique du 7ème Art. On en avait bien vu quelques images depuis l’invention d’internet, mais en entier et en salle (et en version restaurée présentée par Paul Verhoeven, n’en jetez plus), jamais. Il est difficile de se projeter en spectateur candide rajeuni de trois décennies, c’est donc avec un regard neuf pour le film, mais vieilli pour le spectateur, que l’on va se risquer à quelques commentaires.

Rappelons une évidence, le film date de 1992, et la première crainte était qu’il n’ait vieilli. Cette appréhension se révèle un peu justifiée : même si les années 80 n’étaient déjà plus au moment du tournage, l’ensemble reste très clinquant comme le fut le cinéma de cette décennie. La virtuosité de Verhoeven le sauve souvent, mais là, il lui arrive d’en faire un peu trop : notamment avec deux poursuites de voitures dont on peine à comprendre ce qu’elles viennent faire dans un thriller érotique (il est vrai qu’à San Francisco, depuis « Bullit » - 1968, c’est un peu un passage obligé la course poursuite automobile).

Le côté sulfureux, mis très en avant à la sortie, est aujourd’hui proche de l’anecdotique. A l’ère de la pansexualité normative, ces petits frissons lesbiens ou vaguement masochistes n’impressionnent plus guère. On leur reconnaîtra toutefois une belle et troublante mise en image, l’esthétisme léché n’empêchant pas éros et thanatos de jouer à l’écran leur petite danse séduisante et vénéneuse.

Les références à Hitchcock sont nombreuses, tant de plans semblent ainsi des clins d’œil plus qu’appuyés à « Vertigo » - 1958 (qui se déroule d’ailleurs dans le même coin, la Californie comme une enfilade de mégalopoles implantées dans une nature puissante). Et puis les blondes sont ici fatales, ce qu’Alfred confirmerait.

En réalité, ce dont souffre surtout le film, c’est de ce dont nous prive l’époque contemporaine. Nous sommes noyés d’images, nous croyons tout savoir, d’ailleurs nous n’avons plus de doute : nous savons que Sharon Stone n’a pas de culotte dans la scène de l’interrogatoire et qu’elle est un assassin sans pitié. L’érotisme comme le film noir ont besoin de mystère, et l’œuvre a été mangée par la modernité, on sait déjà tout avant de l’avoir vue.

Il faudrait peut-être retrouver un regard d’il y a trente ans pour percevoir à nouveau ce qu’il y avait de potentiellement novateur et magique dans « Basic Instinct », nonobstant les qualités toujours indiscutables du film.

Sébastien Bourdon

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