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A Farewell to a King : Neil Peart

dimanche 12 janvier 2020, par Sébastien Bourdon

Je me souviens de beaucoup de disques et de non moins de chansons, mais pourquoi le souvenir de « Red Barchetta » une nuit voilà longtemps sur une départementale tout juste normande au volant de ma vieille Fiat Uno me frappe toujours autant. Je ne découvrais ni Rush, ni l’album « Moving Pictures » (1981), mais cette manière qu’avait le trio d’introduire ce morceau m’a frappé comme une évidence dans le presque silence de cette route nocturne. Les quelques accords de guitare, de basse, de synthé et ce toucher de cymbale beau comme l’antique, progressivement remplacé par un groove sur la charleston qui va rapidement précipiter le trio dans le morceau.

Neil Peart était un incroyable batteur et un immense artiste, un corps jouant à la perfection, avec un cerveau plein de rythmes et de lectures. Homme à l’exigence presque ascétique, il ne posait en effet ses baguettes que pour lire ou écrire. Des livres qu’il dévorait, il tirait les textes de son groupe, de son travail acharné derrière son kit, il extrayait le rythme aussi complexe qu’essentiel qui portait la musique de Rush.

Groupe prog aussi culte que vénéré dans le monde entier, Rush est une sorte de mètre étalon du rock alambiqué, produisant aussi facilement phénomènes d’adoration que pincements de nez. Se moquant singulièrement de l’avis d’autrui, le trio canadien a poursuivi sa très longue carrière avec une absolue liberté, sans manquer de régulièrement produire des chefs d’œuvre et ce jusqu’à la fin.

A mille lieux des clichés sur le rock n’ roll, Neil Peart étudiait donc la philosophie, les oiseaux ou le français, faisait du trekking ou du vélo. Un honnête homme au sens voltairien du terme qui n’a cessé de vouloir remplir son existence de quêtes intellectuelles ou physiques, fuyant comme la peste les trompettes de la renommée.

La vie ne lui a pas toujours été très tendre, lui arrachant sa fille et sa femme coup sur coup en 1997 et 1998. Les deux femmes de sa vie enterrées, il était monté sur sa moto pour un immense périple solitaire en Amérique, disparaissant aux yeux de tous, se coupant même de la musique. Personne ne le reconnut jamais sur la route et il tira de ce long exil endeuillé un beau livre, « Ghost Rider » (2002).

Un beau jour, il a fini par réserver un studio et s’est colleté à nouveau avec une batterie, seul face à l’instrument qui avait façonné sa vie et dont il avait révolutionné la pratique. Il se l’est réapproprié, il a rappelé Geddy Lee (voix, basse, claviers) et Alex Lifeson (guitare) et remis en route une splendide affaire musicale qui aura duré plus de quarante ans (juillet 1974 - décembre 2015).

C’est probablement se sachant malade (cancer du cerveau) que Neil Peart a finalement raccroché les baguettes, mais comme toujours il a été d’une immense discrétion pudique. Le voilà à nouveau disparu, ayant enfourché un dernier bolide pour un ailleurs inconnu et définitif. Comme il l’a écrit dans le morceau « Nobody’s Hero » : « When I heard that he was gone I felt a shadow cross my heart  ».

Sébastien Bourdon

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