Le Voyage en Italie (chapitre 9 - 3ème partie)

En descendant du train, dans la petite gare paisible de Formia-Gaeta, une odeur forte de bois brûlé nous parvient immédiatement aux narines. Au regard de la saison et de la température, il est peu probable que quelqu’un ait allumé un poêle ou se soit fait une colossale flambée. Le ciel de fin d’après-midi est voilé de nuages bas qui ne sont rien d’autre que de la fumée, de celle qui consume les arbres. Il y a le feu sur la rive d’en face.

Cet événement ne semble pourtant qu’une péripétie aussi lointaine que la guerre en Ukraine aux vacanciers dans le port solaire et paisible de Gaeta.

La nuit, le feu reprend de plus belle, et devenu de ce fait encore plus visible à raisonnable distance, il offre au regard un spectacle dantesque (forcément), d’une grande beauté inquiétante. Comble de l’absurde, alors que cela flambe d’un côté, on tirera un feu d’artifice en face pour distraire le touriste en mal de loisirs.

Et si, tels des colibris, on se levait tous de table et armions un navire pour aller vider notre verre de Prosecco dans les flammes, cela changerait peut-être quelque chose ? On se résout à l’évidence que non, et finissons notre verre face au désastre (qui se reproduit annuellement depuis quelques années, nous dira-t-on le lendemain).

A la table à côté, un couple regarde ses enfants plantés chacun sur un téléphone, entre jeux et dessins animés, moyens factices et provisoires d’obtenir le calme. La nature dans sa violente beauté s’était pourtant chargée de leur offrir un spectacle à l’œil et qui valait le coup d’œil. La mère est enceinte jusqu’aux yeux, il faudra bientôt un troisième téléphone.

Sébastien Bourdon

« If you don’t want to boil as well
Better start the dance
Do you want to dance with me ?
You better start doing it right  »

Genesis « Dance on a Volcano »