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Lève la lunette !

« Mammuth » de Gustave Kervern et Benoît Delépine

mercredi 12 mai 2010, par Sébastien Bourdon

L’autre jour, une journaliste a demandé Gérard Depardieu s’il pouvait lui parler du fait que le film était dédié à son fils défunt, Guillaume. Ce dernier, brusquement agressif, lui a répondu « non, pourquoi tu veux que je t’en parle, salope !!! » et a finalement tourné les talons dans un rire sonore, sous les cris des journaleux outrés. J’adore ce mec.

Gérard Depardieu est le plus grand acteur du monde. Je le sais depuis La chèvre que j’avais vu avec ma sœur et mes parents au cinéma d’Enghien-les-Bains en 1981. C’est comme ça, c’est simplement évident dès qu’il apparaît à l’écran.

Et Mammuth le confirme, d’autant qu’il y a longtemps que je n’avais pas eu envie de voir un film avec Gérard Depardieu dedans. Boulimique, il avait fini par tourner dans tout et n’importe quoi, sans cohérence, devenant une sorte de De Niro français un peu dingue, mais absolument sans danger. Loin des films de Blier ou de Ferreri tournés dans les années 70. L’embourgeoisement qui pousse parfois des artistes français respectables à passer leurs dimanches après-midi dans un canapé chez Drucker.

Et là, gros avec des cheveux longs, dès les premiers plans, il est magnifique. Présent intensément, mais sans jamais que la mythologie de l’acteur ne vienne dévorer un superbe personnage.

Kervern et Delépine offrent effectivement à Depardieu un film à la hauteur de l’acteur. Encore une fois, comme avec Louise Michel, on sort de la salle après avoir été aussi bien bercés que secoués, sans forcément être à même de bien déterminer les moments où un sentiment a prédominé sur l’autre. On a pu ainsi être touché par le très beau couple formé avec Yolande Moreau mais littéralement effrayé par les interventions fantomatiques et hallucinées d’Isabelle Adjani.

L’alternance entre la poésie et le burlesque ou entre le grivois et le limite glauque peut être brutale mais le film ne se prive pas de respirations et d’apesanteur. Ces moments aériens, dans une Charente (parfois Maritime) filmée comme si elle était photographiée avec un vieux Lomo, sont précieux et ne nuisent pas au film. Ca m’a même donné envie de passer mon permis moto pour parcourir les routes de cette région qui m’est chère.

Ne cherchez pas trop l’actualité dans cet opus narrant l’histoire d’un type qui découvre avec la retraite qu’il est vieux et qu’il lui manque des papiers. Film anar, mélancolique et réjouissant, à mille lieux des trépidations de l’actualité, mais contant quand même une échappée marquée par l’époque.

Sébastien

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